Braxton était éreinté. Jouer avec le gryffondor ne l'avait pas tant fatigué que l'engueulade violente avec son père qui avait suivi. Ce vieil hiboux... Bon, peut-être pas si vieux que ça, mais quand même. Bizarrement, Richard Terouec ne s'était pas appesanti sur le fait qu'il se soit battu -et qu'il s'en soit tiré vainqueur- avec un ennemi de sa maison. Mais plutôt sur l'acte qu'il avait commis juste avant: le racket du petit Poufsouffle. Ça, dès qu'on touchait à ses chers protégés, le directeur de maison qui était en lui s'éveillait comme un dragon. Un dragon qui sommeillait rarement plus de vingt-quatre heures, d'ailleurs...
Et vas-y que je contiens ma colère, et vas-y que je te traite d'irresponsable, mais que dirait ta mère si elle te voyait, et donne-moi cet argent gnagnagna... Oui, Braxton était un sale gosse, oui il pourrait éventuellement regretter son geste ou ne pas être puni... et pourquoi pas en acceptant une sortie en famille en compensation ?
L'adolescent avait crispé les poings sous la table. Il n'y avait rien à y faire, ce cher Richard était un petit manipulateur. Et quoiqu'il puisse en dire, le jeune homme l'aimait bien, au fond. Même s'il se refusait le droit de l'admettre. C'était pour ça qu'il lui en faisait voir de toutes les couleurs. Pour se convaincre que quoiqu'il advienne, il ne l'accepterait jamais vraiment comme un père. Vous croyez que Braxton, ce cher Braxton qui répugnait au racket ou habituellement à toute forme de violence, avait choisi un Poufsouffle par hasard ? Pourtant, ils passaient parfois de bons moments ensemble... et sa mère était tellement amoureuse, et heureuse dans ses bras... Un petit pincement au cœur, le vert et argent chassa ses pensées, secouant la tête comme si cela pouvait l'aider à remettre son cerveau à l'endroit. Voilà pourquoi il était fatigué. Pas à cause de ses "exercices physiques", mais de toutes ces idées saugrenues qui trottinaient dans sa tête. Un seul claquement de langue de sa part, et elles se remettraient à galoper comme des forcenées.

A son entrée dans la salle commune des serpentards, toutes les têtes se levèrent, certains "camarades de classes" s'approchant même pour lui filer une tape dans le dos ou simplement le saluer...

- Alors Braxton ? On martyrise les p'tits jeunes ?
- La tête du gryffondor quand il s'est relevé !
- J'avoue, t'y es pas allez de main morte !
- Heeey, Braxton, tu remets ça quand tu veux, faut leur rappeler qui commende ici !
- Le retour du...

Les voix se pressaient autour de lui, les phrases bourdonnant comme de petits insectes insupportables. Mais les autres serpentards ne le lâcheraient pas aussi facilement. Et puis, il devait leur montrer qu'il était fier de ce qu'il avait réalisé, après tout. Même si ce n'était pas vrai. Ou disons plutôt qu'il ne regrettait pas sa victoire, mais qu'au vu de ce qu'il avait commis juste avant elle prenait un goût bien amère sur son palais. Il n'aimait pas ça. Il n'aimait pas ce qu'il était, et ce qu'il devait leur faire croire. Mais il avait adoré envoyer ce gryffondor au tapis, même si le motif initial était mauvais. Et il se délectait du fait qu'on le traite en grand vainqueur. Alors il avait sans aucun doute sa place dans la maison de Salazar...

" Désolé les gars, je suis vanné, et mes fringues sont trempées du sang de cet imbécile heureux. Ils ne sont même pas capable de saigner proprement... !"

A vrai dire, le sang qui gouttait de son visage lui appartenait. Mais la blague était bonne, et son entourage, avachi pour beaucoup dans les fauteuils de la salle commune, éclata de rire. Il sortit ensuite les quelques pièces ayant réchappé au regard désapprobateur de son paternel, avant de les lancer à un petit caïd de cinquième année qui se tenait non loin de lui:

"Tiens, Dreak, pour le café."

D'un pas nonchalant, Braxton pris la direction du dortoir qu'il partageait, entre autre, avec Morten Nielsen, son ami d'enfance. Morten, c'était un peu le mec pour lequel il se sentait obligé de jouer les gardes-fous. Celui dont les actes, totalement inconsidérés, pouvaient vous attirer autant de joie que de... bah, vous savez quand vous vous tapez le front de votre main, la tête baissée en susurrant "mais quel crétin"... oui, de la honte oui. Mais pour lui, rarement pour vous. Malgré tout le serpentards restait quelqu'un de drôle, de sensible, à qui il pouvait parler. Et ils s'entendaient comme cul-et-chemise, jusqu'à un certain point.

Après avoir posé sa veste sale sur sa table de nuit, Braxton jeta un regard vers le lit de Morten, et la forme assoupie qui gisait sous les couettes, lui exposant son dos.

*En voilà un qui ne me criera pas dans les oreilles... au moins jusqu'à son réveil.*

Le reste du dortoir était vide. Ce qui n'était pas plus mal. Sans prêter attention au reste, Braxton attrapa la serviette qui séchait sur la rambarde de son propre lit et se rendit à la salle de bains. Là, il ôta le reste de ses vêtements, avec un regard d'excuse pour son tee-shirt au col imbibé de sang, puis en fit une boule qu'il posa dans le lavabo. Avant de prendre sa douche, il lança un dernier regard à la glace accrochée au mur... Un jeune homme plutôt sexy, avec une méchante coupure à l'arcade sourcilière et du sang séché sur toute la partie droite du visage le lui rendit. Il faudrait qu'il se fasse recoudre ça, sinon il aurait beau se changer, rien n'y fera... Une fois sous l'eau chaude, il laissa ses pensées vagabonder. Des ecchymoses apparaissaient à certains endroits de sa peau. Et ne parlons pas de l'état de ses poings douloureux. Tout compte fait, il y était peut-être allez un peu fort... pas étonnant que l'autre soit resté K.O. ! D'autant plus qu'étant ambidextre, un crochets du droit valait en puissance celui de gauche. Il devrait faire plus attention à l'avenir.
Lorsqu'il eut terminé, Braxton sortit de la salle d'eau, nu comme un ver, sans même attraper sa serviette... de toute manière, il avait une bien meilleure solution... Un sourire espiègle étira ses lèvres. Il étouffa un petit rire à l'idée de ce qu'il allait faire, et, dans la pénombre qui commençait à tomber, s'avança à pas de loup vers le lit de Morten.
Aaaah, il dormait, hein ?!

*C'est ce qu'on va voir !*

Arrivé à mi-chemin, Braxton s'élança brutalement comme s'il avait le feu au derrière en hurlant: " BANZAAAAAïïïïïïïïï "
...
Et se jeta sur le lit de l'endormi, prêt à en découdre lorsqu'il se réveillerait, trempant la couette de son corps dégoulinant d'eau, ébouriffant ses cheveux humides au-dessus de l'oreiller...

"Ça, c'est pour toutes les fois où tu m'as réveillé à coups de coude dans les côtes ! Et Ça ! (Braxton se saisit des pieds de sa nouvelle victime et commença la torture des chatouilles, un des trucs que Morten supportait le moins) C'est pour la fois où tu avais caché mes fringues dans le dortoir des filles !!"

Braxton s'apprêtait à pousser le cri démoniaque de la victoire bien méritée. Il prit une grand inspiration, les yeux pétillants, emplissant ses poumons de cette exaltation vengeresse... mais s'étrangla bien vite sous l'effet du choc face à la forme toute féminine qui émergeait des draps...

Au départ, Emma était descendue aux cachots pour voir son frère. Il était temps qu’ils aient une sérieuse discussion à propos de William, de Traiger, de leur comportement à tous les deux. Elle devait lui parler de son problème de loup aussi, et de ce qu’il s’était passé à l’infirmerie. Ce n’était pas parce qu’ils se boudaient mutuellement à cause de leur relation amoureuse respective qu’elle devait le tenir à l’écart concernant ses ennuis de santé. Il se serait fait du mauvais sang, et après, ça l’aurait mis dans un état d’énervement encore pire que ce qui était imaginable. Morten pouvait être un tel crétin, parfois… Arrivée devant l’entrée, elle frappa trois coups au tableau qui cachait le passage qui menait à la salle commune des Serpentards. L’élève qui vint lui ouvrir n’était autre que Trevor, le capitaine de l’équipe de Quidditch, un grand pote à son frère. Il la laissa passer avec un sourire engageant. Visiblement, il n’était pas au courant du petit litige qui opposait le frère et la sœur. Morten n’avait probablement pas parlé de la raclée qu’il s’était mangé lors de leur dernière entrevue, ça l’aurait mal fiché pour un balèze dans son genre. En tous cas, Morten n’était pas dans la salle. Peut-être qu’il était avec Traiger, dans un placard, en train de la peloter et … STOP ! Elle ne voulait pas avoir les images de son frère en train de roucouler avec sa copine dans la tête, c’était trop traumatisant. Surtout s’il s’agissait de Traiger. La jeune fille repéra un fauteuil laissé libre dans lequel elle alla s’installer. Elle n’était pas pressée, elle avait tout le temps d’attendre Morten. Et elle avait prévu de la lecture pour le cas où il n’aurait pas été là. Elle commença à feuilleter les pages de sa dernière trouvaille de la bibliothèque, guettant les allées et venues dans la pièce.

Au final, elle s’était endormie. Si elle s’était retrouvée dans le lit de Morten, c’était probablement parce que ce dernier était revenu entre temps et avait trouvé sa sœur assoupie dans le fauteuil. C’était certainement lui qui l’avait portée jusqu’à son lit et qui l’y avait allongée sous les draps, et qui avait rangé le livre dans son sac et l’avait mis dans le dortoir. Puis il avait dû repartir Merlin sait où, laissant sa sœur dormir tranquillement. Il ne pourrait jamais cesser d’agir en grand frère, même si elle lui en interdisait le titre, même s’il désapprouvait ses choix. Les Nielsen étaient de sacrées têtes de mule quand même. La jeune fille rêvait à ses potions et ses formules qu’elle aimait tant, elle se voyait derrière un chaudron à mélanger tous ces ingrédients qu’elle connaissait sur le bout des doigts. Elle s’imaginait en train de trouver enfin la formule miracle qui l’empêcherait de souffrir de son épilepsie. Emma était donc là, à dormir de sommeil du juste, quand Braxton entra dans le dortoir. Et ce passage de Serpentard mâle en puissance ne la réveilla pas du tout. Elle n’entendit pas la porte de la salle de bains s’ouvrir, pas plus qu’elle n’entendit l’eau couler. Elle n’eut pas conscience que le jeune vert et argent s’approchait du lit à pas de loup. Elle n’ouvrit les yeux que lorsque la masse de pachyderme en surpoids de Braxton s’abattit sur le lit, manquant de l’écraser, et lorsque peu de temps après, on lui saisit le pied.

"Ça, c'est pour toutes les fois où tu m'as réveillé à coups de coude dans les côtes ! Et Ça ! C'est pour la fois où tu avais caché mes fringues dans le dortoir des filles !!"

Pardon ? Eyh, laisse-lui au moins le temps de se réveiller ! Le temps que les évènements lui reviennent en mémoire, Emma retira vivement son pied des mains chatouilleuses de Braxton, dont elle venait de reconnaître la voix. Heureusement qu’elle n’était pas chatouilleuse, contrairement à son frère aîné. Elle se retourna tout aussi vivement vers le jeune homme en le pointant d’un doigt vengeur et menaçant. Elle ne prit pas immédiatement conscience de sa nudité totale, après tout, elle regardait ailleurs qu’à la cave. Tiens, il avait l’air d’avoir saisi qu’il s’était gouré de Nielsen. Mieux valait tard que jamais, au fond, mais ça ne l’empêcherait pas de lui hurler un peu dessus, juste pour la forme.

« Non mais tu es un grand malade mental Terouec ! » Quand elle était énervée, Emma l’appelait par son nom de famille au lieu de son prénom. « Est-ce que j’ai l’air d’une blonde comme Morten ? Est-ce que j’ai l’air d’un abruti de crétin de Serpentard ? »

Emma et Braxton, c’était une longue histoire. La famille de Braxton avait emménagé à côté de la maison des Nielsen quand Morten avait neuf ans, et elle sept ans. Si les deux garçons avaient tout de suite sympathisé – vous me direz, entre crétins, c’est normal – la relation que Braxton avait entretenue avec Emma avait été plus… particulière. D’abord parce qu’il avait déclaré immédiatement, dans son anglais plus qu’approximatif, que la petite fille était sa nouvelle amoureuse. Ça ne l’avait pas spécialement dérangé quant à elle, puisqu’elle trouvait le petit garçon blond et tout bouclé très mignon. Histoire de lui faire comprendre qu’elle était d’accord, elle lui avait même donné un baiser, tout ce qu’il y avait de plus chaste et enfantin. Cette amourette de gosses avait duré un certain temps, pratiquement jusqu’à l’entrée d’Emma à Poudlard. S’ils s’étaient jusque-là promis un amour éternel et sans faille, ils avaient convenu, à la fin, qu’ils s’entendaient mieux en tant qu’amis. Ça arrangeait bien Morten, il avait eu du mal à accepter cette pseudo histoire d’amour, il préférait nettement que Braxton et Emma soient amis, ça lui faisait un ami de plus sur lequel compter pour surveiller et veiller sur sa sœur. Suite à un défi stupide, il avait même convaincu Braxton de se faire tatouer le nom d’Emma sur le corps. Selon la jeune fille, tout ce bazar autour d’elle était ridicule, et elle avait bien ri quand elle avait vu l’ami de son frère avec son prénom écrit sur son doigt. Question tatouage, elle avait vu tous ceux que Braxton avait sur le corps. Rares étaient les filles de Poudlard qui pouvaient s’en vanter.
Et puis, alors qu’elle allait lui sortir ses quatre vérités et continuer à l’invectiver, elle baissa légèrement les yeux. Et remarqua que Braxton était très, très exposé.

« Brax… pourquoi tu es tout nu ? Et pourquoi tu sautes sur le lit de mon frère alors que t’es tout nu ? » Elle lui jeta un regard suspicieux. « T’es gay en fait, c’est ça ? Je me disais bien, aussi, qu’un gars qui prend autant soin de ses cheveux ne peut être que gay… »

Emma repoussa la couette désormais trempée, recouvrant par là même le jeune homme et son petit oiseau, et se leva. Elle fit quelques pas autour du lit, toujours en regardant Braxton de haut en bas. Il l’avait bien cherché, au fond. Il n’avait qu’à pas la réveiller, et elle ne serait pas en train de le mettre mal à l’aise. Il ne manquait plus que Morten débarque pour que le tableau soit complet et que la boucle soit bouclée.

« Nan puis tu as mouillé tout le lit ! T’abuses, sérieusement ! J’ai plus qu’à aller dormir dans ton lit, et tu te débrouilleras avec l’abruti quand il reviendra. J’peux plus retourner dans mon dortoir maintenant, sinon je vais me faire prendre, et je vais faire perdre des points à Serdaigle… »

La jeune fille se tenait face à lui – heureusement, elle le regardait droit dans les yeux – les mains sur les hanches, un sourire à la fois moqueur et blasé sur les lèvres. Elle avait l’habitude des bêtises de Morten et de Braxton. Il ne se passait pas une semaine depuis son entrée à Poudlard sans qu’elle n’entende parler de l’un ou de l’autre, voire des deux à la fois. Ça pouvait être les glousseuses habituelles qui bavaient sur les deux garçons, ça pouvait être les professeurs qui se plaignaient d’un manque de respect ou autre, ça pouvait être les Gryffondors qui les insultaient… Braxton occupait encore une part entière de sa vie.

Il fallut à Braxton un certain temps pour se rendre compte de la position dans laquelle il se trouvait à présent... Pourquoi Morten n'était-il jamais là où on le voulait, Bon Sang ?! Quoique maintenant, il valait mieux qu'il évite de se pointer. Il risquait de poser des questions pour le moins... "dérangeantes". Braxton se voyait mal entrain d'essayer de lui faire avaler qu'il y avait quiproquo, et que, non, il n'était pas un pervers psychopathe qui tentait de choper sa petite sœur endormie... Mouai, non, on allait éviter.

"Em.. Emma..."

Oui, bon, le coup du bégaiement ça ne faisait pas très intelligent, d'accord. Mais d'un autre côté Braxton était tellement choqué par ce mauvais coup du sort qu'il avait du mal à s'en remettre. Et puis il était... il était, il était... à poil ?! Reprenant conscience de sa nudité au ras des pâquerettes, et surtout en présence de la petite sœur de son meilleur ami, le serpentard se sentit couler comme une pierre. Disons même, plus que d'habitude: si le ridicule pouvait tuer, il n'aurait pas donné cher de sa peau en cet instant. Ancienne "chérie" ou non, tous deux avaient bien grandis depuis cette époque là, que ça soit mentalement (sisi) ou physiquement... En tout cas, dans sa colère, la jeune fille ne semblait pas trop faire cas de son corps d'athlète luisant de perles d'eau. Alors Braxton la laissa parler, cherchant vainement autour de lui quelque chose qui, au moins, lui rendrait un peu de son humanité. De toute manière, lorsque Emma passait en mode diablesse il n'y avait pas grand chose à faire de plus...

Devant la futilité de ses efforts, Braxton croisa les bras sur sa poitrine et adressa à la jeune fille un regard espiègle.

"Je suis désolé que vous soyez de la même famille. Même l'odeur ne m'a pas averti..."

C'est alors que l'adolescente sembla découvrir les atours dévoilés du vert et argent... il le vit à ses yeux qui s'écarquillaient de surprise. Par contre ses fausses élucubrations sur sa sexualité lui arrachèrent bien vite une grimace agacée. Aussi prit-il le ton patient du professeur face à un élève récalcitrant pour lui rétorquer:

'Voyez-vous, mademoiselle Nielsen, "ceci", et une marque de virilité. Et, non, je ne suis pas gay. (un sourire salace vint éclairer ses traits) Mais si tu en doutes, je t'en fais la démonstration illico-presto, tant que Morten n'est pas là..."

Il lui adressa un petit clin d'œil avant de se recevoir la couette sur la tête. S'en emparant vivement, il la teint devant lui en envoyant du bout des lèvres un petit bisou aguicheur à la jeune serdaigle.

"Merci ma chérie pour cette nouvelle preuve d'amour..."

Bien évidemment, Braxton ne s'intéressait pas à Emma sur ce plan là. En fait, depuis qu'elle était arrivée à Poudlard leur "relation" s'était transformée en une solide amitié, et chacun se riait de l'autre en s'envoyant des petits mots doux. De toute manière, Morten avait été très clair sur la question. Avec un petit sourire, Braxton jeta un regard au nom d'Emma qui trônait sur son doigt. L'encre avait été spécialement conçue pour ne pas s'atténuer, que ce soit par des moyen médicaux ou magiques. Sitôt qu'on réussissait à l'effacer, elle réapparaissait. C'était parti d'un pari débile. Mais Morten avait oublié que son vieil ami remportait toujours les défis... quoiqu'avec du recule, ce n'était pas le frère d'Emma qui avait l'air le plus crétin des deux dans l'affaire. Bah, ils avaient l'habitude de toute manière.

Lorsque Emma évoqua son obligation de squatter son lit, Braxton lui jeta un regard mauvais avant d'agiter ce fameux doigt inquisiteur sous son nez.

"Hors de question que tu t'installes ma cocotte. Ou du moins, pas toute seule. Je n'ai pas trempé le lit de Morten pour qu'il s'en sorte comme un gai luron. Je dors avec toi, et inutile de chicaner. C'est ça ou je te prends sur mes épaules pour te ramener dans ta haute tour, princesse."

Ça ne serait de toute manière pas la première fois qu'ils dormiraient ensemble en toute amitié, et la jeune serdaigle devait se douter que Braxton exécuterait la menace sans un regard pour sa dignité. Ça ne serait pas non plus la première fois que le jeune homme se ferait prendre, et, au pire, il pourrait toujours dire qu'il avait trouvé Emma perdue dans les sous-sols et qu'il s'était senti obligé de la ramener... Tiens, il ne l'avait pas encore faite, celle-là, peut-être qu'elle fonctionnerait !

*Héhéhé*

D'ailleurs, en parlant de dignité, le jeune homme se dit qu'il était peut-être temps de trouver un caleçon adéquat. A vrai dire, la toge romaine c'était très peu pour lui... il était hétéro, oh ! Et serpentards de surcroît. Il n'allait pas nuire aux apparences en se baladant enroulé dans une couette à travers tout le dortoir. A la limite s'il devait la ramener, le caleçon moulant ferait bien meilleure impression sur sa cohorte de fanatiques, avec ou sans haut... Bon après, il ne fallait pas pousser non plus: les fans, les fans... si Morten le croisait torse poil avec sa sœur sur les épaules, cet imbécile allait encore cogiter. Sauf que des rouages qui s'actionnaient dans le vide, ça donnait rarement un résultat positif pour le progrès social.

Sans plus prêter attention à l'adolescente, le jeune homme lui tourna le dos et se mit en quête d'un vêtement quelconque, seyant, et propre de préférence. Il en trouva un dans le sac qu'il avait posé contre le mur à l'opposé de son lit. La pénombre n'était pas la chose la plus pratique pour enfiler des fringues, aussi alluma t-il auparavant sa lampe de chevet (offerte pas maman-poule). Il adressa ensuite un petit sourire mesquin à Emma...

"Pour que tu puisses faire de beaux rêves cette nuit !"

...et lui tourna à nouveau le dos, laissant tomber la couette au sol pour pouvoir enfiler son caleçon. Ce n'était, certes, pas très gentleman d'exposer ses fesses à une jeune demoiselle, mais Braxton s'en moquait, de toute manière il n'avait pas d'autre choix... Et à vrai dire, dans sa logique d'économie de mouvement il ne pensa même pas à se rendre à la salle de bains. Emma avait déjà tout vu, ce n'était pas une paire de fesses délicieusement sculptées qui allait la traumatiser d'avantage !

Emma leva les yeux au ciel. La répartie serpentardarienne laissait de plus en plus à désirer ces derniers temps.

'Voyez-vous, mademoiselle Nielsen, "ceci", et une marque de virilité. Et, non, je ne suis pas gay. Mais si tu en doutes, je t'en fais la démonstration illico-presto, tant que Morten n'est pas là..."

Bah voyons. Une chocogrenouille et un gallion avec ça ? Il la prenait pour qui, la fille née de la dernière pluie ? Ça marchait peut-être avec la plupart des filles sans cervelle, mais pas elle. Et Braxton le savait pertinemment.

« Oh mais bien sûr chéri ! Et après, ça ne sera pas seulement mon batteur de frère qui va vouloir te défoncer la tête, mais aussi mon batteur de petit ami… Brillante idée, t’en as encore qui te passe par ta petite cervelle de blonde en puissance ? » Puis elle ajouta, sans se départir de son sourire malicieux : « Et puis, honnêtement, c’était plus grand dans mes souvenirs. On dirait que tout le corps a grandi, sauf cette partie-là… »

La jeune femme ne fit pas grand cas de son clin d’œil ou du baiser qu’il lui avait envoyé pour plaisanter, elle savait que sa remarque lui vaudrait une petite revanche de la part du meilleur ami de son frère. Au moins il pouvait la remercier – il le fit d’ailleurs – parce qu’elle lui avait balancé la couette trempée sur la tête. Elle n’avait plus à supporter sa nudité ô combien choquante pour une jeune fille pure et innocente comme elle. Et ça, c’est l’hôpital qui se fout de la charité. Enfin, non, c’est vrai qu’Emma était bien plus sage que le zozo en face d’elle ou que son frère, concernant les relations amoureuses. Ce n’était pas peu dire, puisque le seul garçon pour qui elle avait éprouvé un semblant d’amour avant William était justement Braxton. Mais vous savez ce qu’on dit, ce sont ceux qui en parlent le moins qui en pensent le plus… Puis il évoqua le lit de Morten.

"Hors de question que tu t'installes ma cocotte. Ou du moins, pas toute seule. Je n'ai pas trempé le lit de Morten pour qu'il s'en sorte comme un gai luron. Je dors avec toi, et inutile de chicaner. C'est ça ou je te prends sur mes épaules pour te ramener dans ta haute tour, princesse."

Princesse. Il n’y avait bien que lui pour l’appeler de la sorte. Quoique Will semblait s’y être mis, lui aussi. Elle n’avait rien d’une princesse pourtant. Elle était farouche comme un animal sauvage, bien que ce trait de caractère soit caché par sa timidité débordante. C’était une blague, n’est-ce pas ? Il était en train de la faire marcher, et elle, elle courrait ? Il ne pensait pas sérieusement à dormir avec elle, même en toute amitié ? Il savait pourtant les répercussions que cela aurait sur leurs réputations, et il ne manquait plus que Morten en entende parler pour qu’il décide d’achever son ami.

« J’crois pas non… Primo, si on est dans le même lit quand Morten débarque, je ne donne pas cher de ta peau de bellâtre blond. Deuxio, si les autres crétins de ton dortoir l’apprennent, ça va faire le tour du château, et ça finira en histoire complètement tordue. Tercio, je sors avec quelqu’un. Pour de vrai. Juste au cas où tu t’en souvenais plus. Et je ne pense pas qu’il appréciera que je dorme avec toi, même si nous sommes amis… De toute façon, je ne pense pas qu’il t’aime spécialement déjà… »

Alors qu’Emma allait bouger pour s’installer dans le lit de Braxton sans lui laisser aucune chance de pouvoir venir y dormir également, ce dernier alluma la lampe la plus proche, l’aveuglant subitement. Quand elle eut recouvré toute son acuité visuelle, ce fut pour observer un derrière qui se dandinait. Charmant.

"Pour que tu puisses faire de beaux rêves cette nuit !"

La Serdaigle s’apprêtait à répliquer que ça allait plutôt lui donner des cauchemars au moment où elle aperçut quelque chose sur la fesse droite de Braxton qui retint toute son attention. Deux petits mots qui, elle l’aurait juré, n’était pas là la dernière fois qu’il lui avait montré ses tatouages. Little Lamb. Il était foutu. Mort de chez mort. Il allait en voir des vertes et des pas mûres, et c’était uniquement de sa faute à lui s’il allait souffrir le martyr. Quelle idée de lui donner une telle arme qu’elle pouvait utiliser contre lui aussi ! Maintenant qu’il avait enfin enfilé un caleçon, ils allaient pouvoir commencer à rigoler un peu. Elle passa derrière lui avant qu’il ne se retourne et lui mit une fessée, puis se précipita sur son lit avec un grand sourire innocent. Certes, le sourire était inutile, il n’y avait qu’eux dans la pièce donc c’était forcément sa main à elle qui venait de frapper le délicat popotin de Braxton. Mais même, juste pour le fun, elle pouvait tenter de jouer la carte de l’oie blanche. Elle se glissa sous la couette en un mouvement et retira sa veste et sa jupe d’uniforme. Elle, au moins, gardait une certaine pudeur devant le jeune homme et ne se déshabillait pas devant lui. Elle se retrouvait juste en t-shirt et en sous-vêtements, mais au moins, elle n’était pas nue, contrairement à certains. Je ne vise personne, suivez mon regard.

« Alors mon agneau, tu m’avais pas dit, pour ton petit dernier… C’est en quel honneur celui-là ? Un autre pari stupide avec Morten, un hommage aux côtelettes que tu dévores, un aveu concernant tes cheveux bouclés ? »

Emma aurait bien continué à rire, mais maintenant qu’il y avait de la lumière et qu’elle faisait face à Braxton, elle aperçut les marques sur son visage. Elle soupira en secouant doucement la tête de gauche à droite. Ça n’avait pas manqué, il s’était encore battu. Morten pouvait être un vrai crétin, mais tout de même, il se battait beaucoup moins que son ami. Un instant, elle se demanda ce qu’il s’était passé cette fois, sans le formuler à haute voix. Le Serpentard ne parlait pas de ces petits affrontements qu’il avait avec d’autres élèves devant elle, et elle supposait que c’était parce que Morten le lui avait interdit. Pourtant, pour certains sujets, Braxton préférait souvent venir se confier à elle plutôt qu’à son frère, et elle le comprenait parfaitement. Morten pouvait être un vrai crétin (comme on l’a déjà signalé de nombreuses fois depuis le début de ce RP, et dans tous les autres) et il était capable de se moquer de son ami alors que celui-ci abordait un sujet très sérieux. Le pote par excellence quoi.

« Dans mon sac, il y a des fioles de potions. Tu les avales sans protester, ou c’est moi qui m’en chargerai. Tu ne voudrais pas que tout le monde apprenne que je suis capable de te maîtriser… »

Braxton était au courant de plein de choses, au sujet d’Emma. Il savait qu’elle était épileptique et que ça lui pourrissait littéralement la vie. Quand elle faisait une crise à Poudlard, il débarquait généralement avec Morten à l’infirmerie pour prendre de ses nouvelles. Il s’amusait aussi beaucoup à faire des grimaces dans le dos du frère aîné pour lui redonner le sourire, et ça marchait pour la plupart du temps. Il savait qu’elle était une encyclopédie à potions et une pharmacie sur pattes et qu’elle se trimballait toujours avec un minimum de trois fioles remplies sur elle. Il savait qu’elle avait des rêves qu’elle ne pourrait peut-être jamais réaliser à cause de sa maladie et qu’elle mettait tout son cœur et toute son âme dans certains de ses projets. Il savait quels étaient ses tics quand elle était nerveuse et aimait s’en servir contre elle, chose qu’elle lui faisait très souvent regretter par la suite.

Braxton ne s'appesantit pas sur le discours de la petite serdaigle... Oui, Morten risquait de lui démolir le peu de cervelle qui lui restait. Oui, ce n'était pas bon pour les rumeurs, et -cette remarque-là lui arracha une grimace- oui, elle avait un copain, un vrai. Wiliam Green, le beau batteur de gryffondor -qu'elle ne rechignait sûrement pas à contempler sans ses vêtements, entre nous. A cause de leur relation particulière, Braxton éprouva un petit pincement de jalousie quand elle évoqua son existence... Est-ce que ça ne risquait pas de changer leurs rapports ? Non, c'était idiot... et puis, si jamais c'était le cas, il devrait se faire une raison. Il n'était pas le frère, ni le petit ami d'Emma, qu'elle soit heureuse était tout ce qui lui importait. Même si, bon, elle aurait pu éviter de choisir un gryffondor. Il doutait par contre du caractère recevable de cet argument. Pas tout à fait idiot non plus, le Braxton.
Jusqu'à présent, le serpentard n'avait entendu parler de cet épisode, et du reste, que par la bouche de Morten. Et il aurait été bien dur de garder ses petites oreilles chastes en ces instants. Cependant, Braxton avait observé de loin ce fameux William... Il semblait correspondre à tous les idéaux de la maison de Godric. Sa sœur était plutôt mignonne, aussi. Pour le reste, il ne le connaissait pas, n'avait jamais cherché à le connaître, et ne chercherait à le faire que si l'obligation l'imposait.
A part quelques petits agissements histoire de se faire bien voir, Braxton n'éprouvait pas ce besoin physique qu'avait certains vert et argent de se précipiter sur la première lueur dorée qu'ils apercevaient. Oui, certes, il avait dégommé un de ces rebuts il y avait un peu moins d'une heure, mais ça, c'était uniquement pour embêter son père. Rien à voir avec un motif issu de ses propres notions relationnelles.

Une petite douleur sur la fesse l'éveilla soudain au monde qui l'entourait. Il sursauta, jetant un regard derrière lui.

"Hey !"

D'accord, il avait fini d'enfiler son caleçon, mais ce n'était pas une raison !
Voyant l'air innocent qu'affichait Emma, Braxton fit mine de chercher un coupable dans la pièce, vide de surcroît. Quitte à avoir l'air débile, autant le faire jusqu'au bout. D'autant plus qu'il savait q'Emma apprécierait.

« Alors mon agneau, tu m’avais pas dit, pour ton petit dernier… C’est en quel honneur celui-là ? Un autre pari stupide avec Morten, un hommage aux côtelettes que tu dévores, un aveu concernant tes cheveux bouclés ? »

Prenant un air efféminé -spectacle extrêmement rare à contempler- le jeune homme lui envoya un tendre baiser tout en minaudant: "C'est classé secret-défense, mon chou !", puis avec un regard plein de sous-entendu: "Tu peux bien me le laisser, celui-là, tu es déjà la,(Braxton fit mine de compter sur ses doigts) troisième personne à l'avoir vu. C'est un honneur, tu sais ?"

Ça c'était une petite feinte idiote pour essayer d'éviter le pire. A vrai dire, à force de vivre avec un tatouage, il arrivait qu'on en oublie l'existence. D'autant plus que celui-ci, il l'avait rarement sous les yeux sans l'avoir cherché au préalable... malgré une agilité surprenante, cela va sans dire !
Tout agacé qu'il était, Braxton n'ajouta rien d'autre. S'il continuait sur cette voie, le petit roquet allait encore s'acharner sur le merveilleux os qu'il venait de découvrir. Nul doute qu'il en entendrait encore parler dans plusieurs années... mais cette raison-là, elle ne le saurait pas ! Non mais ! Un peu de respect quand même -pense l'homme qui vient de se ruer à poil sur une jeunes donzelle.
Avec une moue vaincue, Braxton s'avança vers son lit. Lit sur lequel Emma venait de s'étaler comme un gros chat. Oh la saleté. Mais parce que c'était elle, l'étudiant ne dit rien non plus.

« Dans mon sac, il y a des fioles de potions. Tu les avales sans protester, ou c’est moi qui m’en chargerai. Tu ne voudrais pas que tout le monde apprenne que je suis capable de te maîtriser… »

"Ah, ouai... ça.", marmonna t-il pour lui-même.

Il porta la main à sa joue, et la ramena tachée par son propre sang. Le jeune homme l'observa quelques secondes comme s'il ne comprenait pas, avant d'adresser un grand sourire Max Withe à la serdaigle: "J'avais totalement oublié."

Et aussi parce que c'était Emma, il obéit sans broncher à ses recommandations. Qui prenaient plus l'allure d'ordres qu'autre chose. De toute manière son arcade sourcilière continuait de saigner, et même s'il avait une quantité incroyable de sang, le jeune homme ne comptait pas s'évanouir aux pieds d'Emma pendant la nuit. Avec Morten dans les parages, il pourrait être certain de le payer cher... C'est qu'il ne fallait pas la brusquer, la petite fille ! Mais Braxton comprenait. Il aurait aimé avoir une petite sœur comme elle (ou plutôt "demi-sœur", inutile d'impliquer son père là-dedans). Cependant, il avait l'impression que la position qu'il occupait dans sa vie était bien moins contraignante qu'être son grand frère. Il faut dire qu'elle lui en faisait avaler des couleuvres au pauvre Morten !
Arrivé près du sac de la jeune fille, Braxton ouvrit la poche de devant pour récupérer les fameuses potions. Il s'approcha ensuite de la lampe de chevet allumée, et en porta une à hauteur d'yeux pour en observer le contenu. Un liquide ambré tournait bizarrement dans la fiole, comme s'il cherchait à s'en échapper. Perplexe, le vert et argent jeta un regard interrogateur à la serdaigle, puis, devant son air impérieux, la déboucha précautionneusement. Et avala sans broncher.

"...."

Ce truc que vous voyez, juste au-dessus, là, c'est la petite onomatopée de dégoût que Braxton reteint de justesse. C'était complètement infâme ! Ceci dit, être comestible n'était pas le but premier des potions de guérison. D'ailleurs, l'adolescent se demanda en cet instant si celle-là n'avait pas était fabriquée spécialement pour lui... après tout, peut-être qu'Emma se gardait les meilleurs bien au chaud... Dans le doute, il lui coula un regard en biais, finissant d'ingurgiter la troisième et dernière fiole. Mouai. Non. C'était pas le genre de la maison.
Lorsqu'il eut fini, Braxton s'essuya la bouche du dos de la main d'un geste nonchalant, masquant une dernière grimace. Il sentait déjà les premiers effets d'apaisement.

"J'y aurais bien ajouté un peu de cannelle, juste comme ça... non ? Ou de miel, tient. Un truc doux, simple, sucré... D'un autre côté pour un fois j'ai l'impression qu'il n'y a pas de morceaux, ça vous change la vie !"

Il agrémenta cette dernière remarque en lui tirant la langue d'un air malicieux. Braxton était un grand habitué des tambouilles d'Emma. Peut-être qu'un jour, s'il créait un petit logo, elle voudrait bien qu'il la sponsorise... haha !
Le sang avait cessé de couler, mais il faudrait un peu plus de temps à la plaie pour cicatriser réellement. Le corps a ses raisons que la raison ignore, non ?
Avec un soupire fatigué, Braxton s'installa ensuite en position assise sur le lit aux côtés de la jeune fille, en la poussant un peu au passage. Puis il s'empara de l'un des deux oreillers qu'il glissa derrière son dos. Pour éviter tout litige, il lança un regard autoritaire à la jeune fille et se sentit obligé de se justifier...

"Pour discuter. Je m'installerai par terre comme un bon toutou bien sage ensuite. Comme ça je pourrais veiller sur ton sommeil et aboyer en cas de problème. Peut-être même que quand Morten dormira profondément je me roulerai en boule sur tes pieds. Après tout ça ne se refuse pas, je ne perds même pas mes poils... "

Bien évidemment, Braxton savait d'ors et déjà qu'il dormirait dans l'un des fauteuil de la salle commune, devant le feu menaçant de s'éteindre à tout instant. Mais bon, si elle-même dormait bien, il supposait que c'était un sacrifice utile. Il s'en contenterait. L'étudiant aurait aussi pu dormir avec Morten, mais il préférait largement le laisser découvrir que son lit était détrempé. A cette pensée, un petit sourire une coin étira ses lèves. La soirée n'était pas tout à fait fichue, après tout... !
Braxton reporta son attention sur Emma, et se permit de passer un bras autour de ses épaules.

"Alors, j'ai entendu pas mal de trucs intéressants ces derniers temps... Il est gentil avec toi au moins ce "Wiliam Green" ? Non parce que sinon, tu sais que mon côté serpentard se ferait une joie de tester sa résistance physique... non ? Remarque, vu comment il a amoché Morten la dernière fois, je suppose qu'il est bien trop fort pour moi."

A vrai dire, Braxton n'envisageait pas sérieusement de se battre avec le gryffondor. Non, il cherchait juste à titiller Emma... Aurait-il vraiment gagné une bagarre contre l'énergumène batteur ? Mmmh... Aucune idée. Braxton avait pas mal d'expérience en la matière, même s'il répugnait à déclencher un combat, de manière générale. C'était fou le nombre de personnes qui le cherchaient ces derniers temps...

Pour en revenir à la petite demoiselle, le bellâtre blond et son mètre quatre-vingt avaient à présent un vue bien plongeante sur son petit tee-shirt sage. Et il fallait bien dire quand même, que... hmf...

Sans crier gare, le serpentard se pencha brusquement en avant pour plonger sa tête droit dans la poitrine de la jeune fille. Il y frotta sa joue de droite à gauche comme un chat marquerait son territoire, en poussant un gros soupire d'extase:

"AAAAAAH ! Ça fait du bien un peu de douceur dans ce monde de brutes !"

Bah quoi, vous croyiez quand même pas qu'il allait rester sérieux plus de deux minutes, non ?

Emma acquiesça sans sourciller quand Braxton lui désigna les fioles qu’il venait de sortir de son sac. Alors qu’il les avalait sans broncher – de toute façon, ça n’aurait rien changé pour elle – elle se perdit doucement dans ses pensées et ses souvenirs. Elle lui accordait son droit au secret concernant son nouveau tatouage, il pouvait bien lui accorder le sien à faire des potions infectes. Généralement, plus le goût de la potion était atroce, mieux elle agissait. Elle en savait quelque chose, pour les tester sur elle avant de les distribuer à ses amis ou à sa famille quand c’était nécessaire. Heureusement que les cicatrices partaient vite, elle n’aurait pas aimé avoir à expliquer comment elle s’était fait telle coupure ou telle bosse. Elle repensait à leur enfance. Au fur et à mesure que les souvenirs défilaient devant ses yeux se succédaient sur son visage trace de tristesse ou sourire empreint de nostalgie. Elle souriait en repensant à la fois où ils avaient joué au docteur. La seule fois où Braxton lui avait montré ses attributs datait de ce moment-là. Enfin, la seule, c’était vite dit désormais. Elle se rappelait une dispute entre elle et son frère alors qu’elle était à Sainte Mangouste, parce que Morten refusait qu’il entre dans sa chambre pour qu’elle puisse se reposer tranquillement, dans le calme. Ces souvenirs-là lui plaisaient plus que d’autres. Comme la fois où les garçons étaient revenus aux vacances de Noël, la deuxième année qu’ils passaient à Poudlard, et où Morten n’avait pas cessé de taquiner Braxton au sujet d’une jolie blonde d’un an de plus qu’eux qui semblait vouloir se rapprocher de son ami. A ce moment-là, même s’ils étaient encore jeunes, Emma avait été triste d’entendre cette histoire. Elle l’avait caché à Braxton, bien qu’elle se doutât qu’il avait deviné quelque chose à l’époque. Et puis il y avait eu sa propre rentrée à Poudlard l’année suivante.

"J'y aurais bien ajouté un peu de cannelle, juste comme ça... non ? Ou de miel, tient. Un truc doux, simple, sucré... D'un autre côté pour un fois j'ai l'impression qu'il n'y a pas de morceaux, ça vous change la vie !"

La jeune fille ne fit même pas attention à la remarque, ni même au tirage de langue. Elle repensait à la raison pour laquelle ils avaient rompu. Pour laquelle elle avait décidé que c’était fini. Parce qu’ils avaient dit que c’était d’un commun accord, mais au fond, c’était depuis qu’elle l’avait vu comme ça qu’elle avait eu du mal à garder de lui l’image du petit garçon bouclé et sage qu’elle connaissait si bien. Elle se promenait tranquillement dans un couloir, s’apprêtant à se rendre à la bibliothèque pour faire son devoir de métamorphose, quand elle était tombée sur une scène qui était loin de lui plaire. Un petit Gryffondor – certainement de la même année qu’elle, son visage lui disait quelque chose – était en train de se faire plaquer contre le mur par un Serpentard. Elle ne distinguait pas ses traits, de loin et de dos, mais elle n’avait pu se résoudre à laisser l’autre enfant se faire ainsi malmener sans réagir. Elle ne connaissait pas tous les sortilèges qu’elle avait en mémoire aujourd’hui, mais un simple Wingardium Leviosa avait suffi pour décoller le plus grand des trois à une hauteur d’un mètre, permettant à son camarade rouge et or de s’enfuir sans oublier de la remercier. Jusque-là, elle s’était concentrée sur son sortilège et sur le petit garçon, mais puisqu’il n’était plus là, elle pouvait essayer de reconnaître le Serpentard, et en parler à Morten pour qu’il l’empêche de s’en prendre à plus faible que lui. Quand elle avait vu qui elle avait ensorcelé, elle en avait lâché sa baguette, le faisant retomber sur le sol dans un bruit sourd. Le temps qu’il se relève, elle avait ramassé sa baguette et tourné les talons, malgré ses appels pour la retenir. Elle l’avait évité pendant une semaine suite à cet incident, avait catégoriquement refusé de lui parler et avait renvoyé Morten quand il l’approchait pour son ami. Elle avait passé ce laps de temps à réfléchir sur le comportement de celui qu’elle était censée aimer, à réfléchir sur ce qu’elle ressentait à son égard, et à prendre une décision. Bien sûr, elle n’avait jamais vraiment pardonné à Braxton la scène qui avait eu lieu, mais elle lui avait dit qu’elle voulait bien rester amie avec lui, s’il lui laissait le temps de s’habituer au nouveau lui. Est-ce qu’elle avait eu de la peine quand il avait eu une autre petite amie ? Un peu, certainement, parce qu’elle aurait réellement voulu que leur relation dure malgré les obstacles, mais comme elle était celle qui y avait mis fin, elle n’avait rien montré. De toute façon, dans cette école, il valait souvent mieux ne rien montrer de ce qu’on ressentait si on ne voulait pas se faire mettre en pièces.

La Serdaigle réagit à peine quand il vint s’installer sur le lit et passa un bras autour de ses épaules. Elle écouta d’une oreille distraite ses justifications. D’ailleurs, elle n’éprouvait pas le besoin qu’il se justifie, il était devenu une sorte de substitut de frère pour elle et n’était plus un éventuel ancien amoureux. Pour tout dire, elle avait tendance à le comparer plus à un grand frère gay qu’autre chose. A cause des cheveux.

"Pour discuter. Je m'installerai par terre comme un bon toutou bien sage ensuite. Comme ça je pourrais veiller sur ton sommeil et aboyer en cas de problème. Peut-être même que quand Morten dormira profondément je me roulerai en boule sur tes pieds. Après tout ça ne se refuse pas, je ne perds même pas mes poils... "

« Ah ouais ? Et c’est quoi ça alors ? » Fit la jeune fille en récupérant un cheveu blond qui venait de se déposer sur son épaule en le brandissant sous le nez de Braxton. Fièrement, qui plus est. Elle l’agissait tranquillement sous les yeux du Serpentard, profitant du simple fait qu’elle venait de le faire avoir tort. C’était presque jouissif d’ailleurs, parce que ça arrivait tellement peu souvent. Ce qui montrait bien qu’Emma savait apprécier les choses simples de la vie, et pas seulement le Saint Albray (pardon, pardon, pas pu m’empêcher). Elle continua à la narguer quelques secondes, puis finit par terminer : « Encore une victoire de Canard ! »

Braxton, quant à lui, semblait vouloir aborder un sujet de conversation plutôt sérieux. Elle aurait dû se douter qu’il y avait anguille sous roche dès qu’il prononça le nom de William, cela cachait forcément quelque chose. Est-ce qu’il se montrait simplement protecteur avec elle, ou est-ce qu’elle devait l’interpréter autrement ? Elle ne savait jamais sur quel pied danser avec lui. Cette fois, ce fut lui qui profita de son trouble pour faire certainement la pire connerie de sa vie. Mettre sa tête entre sa poitrine et se frotter contre elle comme un gros chat. Trois solutions s’offraient à la jeune fille. Soit il s’était pris un Cognard dans la tête et avait perdu ses facultés mentales – encore fallait-il qu’il en ait eu un jour. Soit il avait pris de la drogue et ne réfléchissait pas correctement, et là encore, il aurait fallu prouver qu’il était capable de réflexion, ce dont elle doutait. Soit, et c’était la solution la plus plausible, il était suicidaire.

"AAAAAAH ! Ça fait du bien un peu de douceur dans ce monde de brutes !"

Saisissement et pincement de la petite peau entre les doigts (essayez, ça fait très mal) qui le paralysèrent sur le moment, permettant à Emma de reprendre le contrôle de la situation. Non, ce n’était pas de la triche, c’était de la ruse. Elle aurait vraiment dû se faire envoyer à Serpentard au fond. En moins de temps qu’il n’en faut pour dire bouse de dragon, elle avait plaqué Braxton à plat sur le lit, s’était installée à califourchon sur lui et le regardait avec des yeux noirs qui devaient l’obliger à commencer à s’inquiéter de son sort là maintenant tout de suite. Réflexe de loup oblige, elle montrait même les crocs, et avait heureusement retenu un grognement animal effrayant à entendre. Inutile de tergiverser sur qui était l’Alpha en cet instant. Bien sûr, d’un point de vue extérieur, la situation était plutôt drôle à observer. Et surtout très ambigüe. De loin, on voyait juste deux jeunes allongés sur un lit. Braxton en caleçon, Emma en t-shirt et petite culotte, les genoux le long des hanches du Serpentard. Ça aurait été vraiment hilarant que Morten entre dans la pièce à ce moment, mais ce n’est pas ce qui se produisit. Dommage.

Menaçante, Emma rapprocha son visage de celui de Braxton. Elle n’était plus qu’à une dizaine de centimètres de lui, ses cheveux avaient glissé de derrière ses oreilles et les entouraient comme une barrière protectrice – enfin, ça dépend pour qui.

« Donne-moi une seule raison de ne pas t’arracher tes attributs pour te les faire bouffer. Valable, la raison. »

"Aïe, aie ! C'est bon, ok, c'est bon !"

Il l'avait bien cherché, d'accord... mais c'était douloureux, oh ! Bon, pas autant qu'un coup de poing ou autres petites esbroufes du même genre, certes. Il avait vécu bien pire... maaais, quand même !
Braxton se laissa maîtriser sans rien faire, se retrouvant en deux-deux allongé sur le lit, les yeux dans les yeux avec une Emma à l'air franchement sauvage. Il aurait pu résister. Cependant, sachant qu'il était dans son tord et que c'était le but recherché -même s'il ne s'attendait pas à autant de hargne- le jeune serpentard adopta une moue boudeuse.

« Donne-moi une seule raison de ne pas t’arracher tes attributs pour te les faire bouffer. Valable, la raison. »

Dégageant ses bras au bronzage parfait de cette "douce étreinte", Braxton croisa les mains derrière sa tête. Il cherchait à répliquer par une de ses âneries coutumières. Sa langue courut sur ses lèvres comme si elle préparait une piste de décollage pour son prochain trait d'esprit, et sa bouche allait se fendre en un large sourire. Lorsque, soudain, il perdit tout entrain. Comme une batterie déchargée. Comme si, de toute manière, ce qu'il dirait ne changerait rien à la donne.
Son visage se fit plus grave, son air plus triste, aussi, presque résigné. L'adolescent détourna les yeux dans une tentative pour esquiver l'attitude féroce d'Emma. Le regard fixé sur un point fictif, loin derrière la colère de l'étudiante, le vert et argent garda le silence durant un lourd instant. Des pensées qui l'avaient effleuré quelques minutes auparavant revenaient au triple galop, comme de braves bestioles bien dressées. Elles n'avaient pas mis longtemps à se manifester. Mais le jeune homme s'en doutait un peu, ceci dit: ces dernier temps, son neurone avait une vilaine tendance à la surchauffe. Et pas pour de vaines broutilles, qui plus est...

"Emma, je..."

Là venait le plus dur de la discussion. Ou plutôt du quasi-certain monologue à venir. Braxton éprouvait depuis quelques temps le besoin de se confier à quelqu'un, de s'épancher un peu. Or la seule personne à qui il pouvait réellement parler se trouvait juste au-dessus de lui en cet instant. Et elle lui en voulait déjà suffisamment, à son humble avis, pour qu'il évite d'en rajouter une couche. Alors peut-être valait-il mieux qu'il enfouisse ses idées sombres avec les autres, comme d'habitude. Peut-être pourrait-il se contenter d'une simple grimace mesquine et d'un: "Il faut bien que j'en profite un peu, tant que Green n'est pas là", ou une autre de ses pirouettes quotidiennes...

William Green. En définitive, cette relation le peinait beaucoup plus qu'elle ne l'aurait du. Et cet aveu là, il fallait dire qu'il venait tout récemment de l'arracher aux profondeurs obscures de son esprit. Et si... Mais avec des "et si", on pouvait refaire le monde sans lever le petit doigt. Alors autant éviter d'aborder le sujet. De toute manière, il n'était pas vraiment amoureux d'Emma, c'était de l'histoire ancienne. La petite pointe de jalousie qu'il éprouvait en pensant au rouge et or venait sans aucun doute d'un petit reste d'enfance. Plus de l'affection qu'autre chose. Voilà, de l'affection. C'était ça. Rien d'autre... Alors Brax, qu'est-ce que tu attends ?

Le jeune homme n'osait pas affronter l'adolescente en face. C'était idiot, pourrait-on dire: un grand serpentard comme ça, de deux ans son aîné, mais qui s'aplatissait tout de même devant une petite demoiselle de serdaigle. Mais Emma, ce n'était pas juste une fille qu'on croise dans les couloirs. C'était une personne dont il ne voulait en aucun cas perdre la confiance. Jamais. Même s'il fallait qu'il se comporte en masochiste pour ça... alors autant arracher le pansement d'un coup, avant que les "on-dit" n'entachent leur relation. Et au diable toutes les recommandations de Morten sur le comportement qu'il devait afficher en présence de la jeune fille. Il n'était pas en acier trempé, même s'il cherchait à en donner l'impression. Emma le savait déjà. Même s'il fallait grattouiller bien plus profondément que sous la surface pour retrouver le petit garçon aux boucles blondes qu'il avait été. Un petit garçon qui était resté caché dans son trou depuis trop longtemps, tout tremblant face à la noirceur des lieux. Et qui avait besoin de respirer un bon coup avant d'y retourner pour s'y cacher, ou plutôt y être enterré, à nouveau.

Braxton ramena l'un de ses bras devant lui, puis tenta de masquer son malaise en cachant ses yeux clos du dos de la main, exposant ainsi sa paume ouverte. Certes, le geste aurait pu passer pour "lâche" ou "dégonflé". Peut-être même "mélodramatique" ou "tragique". Mais le jeune homme avait de manière générale du mal à prononcer les mots douloureux. Le noir l'y aidait. Ne pas avoir à observer en direct-live les réactions d'Emma aussi. Aussi prit-il une inspiration tremblante, et se jeta à l'eau. Probablement pour mieux y couler.

"J'ai fait une connerie... Encore une, hein ?, sa voix se brisa, puis se fit plus rauque: "Ce n'était vraiment pas contre lui. Je lui rembourserai son argent en douce. Je voulais le faire depuis le début. J'ai compté combien y'avait, tu sais ? Avant que ce gryffondor débarque. C'était pour enrager mon père... ça n'avait rien à voir avec lui. Mais j'ai quand même répondu à la provocation...".

Une expiration tremblante fut la seule chose qui transparut lorsque Braxton contrôla le sanglot qui montait dans sa gorge. Il ne voulait même pas imaginer la tête de la jeune serdaigle. C'était déjà assez dur comme ça. S'il la regardait, il risquait de tout relâcher pour de bon. Et il restait quand même un homme attentionné, avec un minimum de dignité traditionaliste, derrière cette main aux phalanges contusionnées.

"Je dois être taré. Ouai, je ne vois même pas pourquoi je pose la question en fait.", et sur cette dernière remarque, un petit rire sarcastique secoua ses épaules. Le jeune homme dévoila ses yeux humides au regard d'Emma avant de poursuivre:

"J'aurais vraiment préféré ne pas atterrir dans cette maison. D'un autre côté, qui a déjà vu un gentil serpentard, pas vrai ? Je ne suis probablement pas là juste parce que j'allais faire une bonne déco de noël..."

Voilà, le petit dernier de ses démons spirituels était enfin sorti au grand jour. A vrai dire, cette pensée l'avait effleurée dès ses premières années à Poudlard... Alors pourquoi ces derniers temps était-ce si différent ? Pourquoi se sentait-il aussi mal dans sa peau ? Il avait vécu comme ça si longtemps... Pourquoi juste maintenant ? Et puis, bon sang, à présent qu'il s'en rendait compte: pourquoi avait-il sorti ça à Emma ?!
Braxton avait horreur de jouer les héros torturés. D'autant plus que la jeune fille n'avait rien à faire dans cette histoire là. Même si le besoin l'avait poussé à s'exprimer. Sans s'en apercevoir, le vert et argent s'était mordu le coin de la lèvre inférieure. Il n'y avait rien à regretter. C'était sûrement ce qu'il aurait du faire depuis un bon moment déjà, au lieu de tout accumuler. Et encore, ce n'était que la pointe de l'iceberg, celle qui avait grand besoin d'immerger.
Après une dernière inspiration déprimée, Braxton coula un regard en biais à Emma, la tête tournée vers la lampe de chevet. Un pâle sourire étira ses lèvres, à peine l'ombre de ses habituelles grimace moqueuses.

"Je suis vraiment désolé, je n'aurais pas du dire ça. Je t'ai sûrement gâché ta soirée avec mes imbécilités."

Le fait qu'Emma soit à califourchon sur lui n'y aida pas, mais Braxton parvint tout le même à se redresser en position assise. Ce n'est qu'alors qu'il se sentit prêt à lui faire face. Quoiqu'elle dise, quelque soit sa réaction. Ses paroles était trop énormes pour qu'il puisse l'imaginer. Trop énorme aussi pour qu'il envisage de passer l'éponge à l'aide de l'une de ses habituelles petites vannes foireuses. Ses muscles se tendirent instinctivement, comme s'il s'apprêtait à engager une nouvelle bagarre. Mais Braxton s'obligea à la détente. Qu'il reçoive une gifle monumentale ou un regard inexpressif voir même, pire, déçu: il l'aurait mérité. C'était peut-être pour ça que les mots avaient jailli: parce qu'il vouait une confiance presque aveugle au jugement d'Emma. Quoiqu'elle fasse, Braxton savait qu'il l'aurait sûrement mérité.

Emma laissa Braxton se dégager de son emprise. Après tout, son but premier n’était pas de le maintenir prisonnier pour le restant de ses jours, mais plus de lui montrer qu’elle savait encore se défendre contre les abrutis de son espèce. Elle s’attendait à ce qu’il réplique quelque chose d’idiot, elle s’attendait à ce qu’il essaie de la renverser, elle s’attendait à ce qu’il se défende. Elle vit l’aube d’un sourire se former sur ses lèvres, et puis, en moins d’une seconde, toute joie semblait avoir disparu du visage de son ami. A la place elle pouvait désormais lire quelque chose de triste, de sombre. Elle en perdit toute détermination à venger l’affront qu’il venait de lui faire. Et comme elle savait pertinemment que si elle l’interrompait ne serait-ce qu’une seule fois, il se murerait dans un mutisme secret, elle se décida à garder le silence jusqu’à ce qu’il ait vidé totalement son sac. Ça faisait un bout de temps qu’ils n’avaient pas parlé, tous les deux, et un instant, la Serdaigle se demanda depuis quand il se sentait aussi mal.

"Emma, je..."

Se montrer patiente. Il fallait qu’elle se montre patiente si elle voulait arriver à quelque chose avec Braxton. Parce qu’il avait lui aussi tendance à être un animal sauvage qu’on ne pouvait dresser. Il avait lancé la discussion, il savait qu’il ne pourrait plus s’en sortir avec une pirouette ou un jeu de mots. Parce qu’Emma ne le laisserait pas fuir. Avec Braxton, c’était souvent faire un pas en avant pour reculer de deux. Elle aurait dû se montrer énervée ou agacée de ce comportement, mais comme elle était exactement pareille que lui sur ce point, elle ne se permettait jamais une seule critique. Elle voyait bien qu’il cogitait, et elle savait que lorsqu’il le faisait, ça n’avait rien de bon. La jeune fille l’observait silencieusement, elle avait l’impression qu’il se torturait mentalement et elle aurait voulu qu’il arrête. Il ramena un bras en avant et cacha ses yeux avec le dos de sa main. Bon. Il avait peur de la regarder dans les yeux quand il se déciderait à parler. Ça, elle avait compris. C’était donc si grave que ça, cette fois ? Elle le sentait tendu sous elle, elle sentait qu’il tremblait, pas réellement, mais plus au niveau de sa voix et de son souffle. Depuis quand est-ce qu’elle remarquait autant ce genre de détails ?

"J'ai fait une connerie... Encore une, hein ? " Oui, mais enfin, c’était pas une nouveauté ça. Elle y était habituée maintenant, même qu’elle ne lui tirait presque plus les oreilles. "Ce n'était vraiment pas contre lui. Je lui rembourserai son argent en douce. Je voulais le faire depuis le début. J'ai compté combien y'avait, tu sais ? Avant que ce Gryffondor débarque. C'était pour enrager mon père... ça n'avait rien à voir avec lui. Mais j'ai quand même répondu à la provocation...".

Oh. D’accord. Donc ça concernait son père, et la bagarre qui l’avait amoché. La Serdaigle était bien sûr au courant des désaccords entre le père et le fils. Si Braxton s’en prenait régulièrement aux Poufsouffles, ce n’était pas contre les étudiants, mais bien contre son paternel. Ça ne devait pas être facile pour lui d’avoir ses deux parents sur le dos constamment, contrairement aux autres élèves. Qui plus est quand les deux parents se trouvent être des directeurs de maisons. Et alors qu’il se demandait s’il était juste complètement fou, Emma, qui se forçait toujours au silence pour l’encourager à continuer, elle, pensa simplement qu’il avait juste besoin d’être un peu rassuré.

"J'aurais vraiment préféré ne pas atterrir dans cette maison. D'un autre côté, qui a déjà vu un gentil Serpentard, pas vrai ? Je ne suis probablement pas là juste parce que j'allais faire une bonne déco de noël..."

Que répondre à ça ? Il lui fallait du temps avant de trouver les mots justes qui le réconforteraient. Juste un peu de temps. Enfin, il se décida à la regarder, et elle perçut nettement les larmes qu’il retenait. Les hommes et leur fierté mal placée de ne pas vouloir pleurer…

"Je suis vraiment désolé, je n'aurais pas dû dire ça. Je t'ai sûrement gâché ta soirée avec mes imbécilités."

Voilà, il avait fini. Et encore, elle était certaine qu’il ne lui avait révélé qu’une infime partie de ce qui le tracassait vraiment. Maintenant, il attendait sa réaction. Il se redressa et s’assit. Ils étaient très proches, physiquement parlant, du coup. Emma se rappela que quelques jours avant ça, elle s’était retrouvée dans la même position avec William. Elle s’était littéralement jetée sur son petit ami ce jour-là. C’était bizarre de se tenir comme ça avec Braxton. Un peu… malsain. Au fond d’elle, elle savait pertinemment que si William n’avait jamais existé, ou si elle ne le connaissait pas encore, elle aurait embrassé le blond à cet instant. Elle ignorait ce qu’il se serait passé ensuite, et tout ça n’était qu’une hypothèse puisqu’elle ne le ferait pas. Parce qu’il y avait William, justement, et parce qu’elle n’aimait plus Braxton de cette manière. Elle passa doucement ses bras autour du cou du jeune homme, de sorte à ne pas l’effrayer par un mouvement trop brusque, puis le serra contre elle dans une étreinte tout sauf agressive. Comme il l’avait dit un peu plus tôt pour plaisanter, un peu de douceur dans ce monde de brutes.

La brunette déposa un baiser sur sa joue puis le força tranquillement à appuyer son front contre son épaule. Chacun son tour d’avoir peur du regard et de la réaction de l’autre face aux mots qui devaient être prononcés.

« Ecoute Brax… »

Par où commencer ? Comment lui expliquer qu’elle ne lui en voudrait véritablement jamais d’être ce qu’il était, parce que c’était ce qui faisait son charme ?

« Tu n’es pas à Serpentard parce que tu es quelqu’un de mauvais, tu n’es pas quelqu’un de mauvais. Tu le sais. Tu y es parce que tu es ambitieux et parce que c’est la maison qui t’aidera à devenir quelqu’un plus tard. Parce que tu n’aurais jamais pu supporter ce que les autres élèves auraient dit si tu t’étais retrouvé avec ta mère ou ton père pour directeur de maison. Parce que tu avais envie d’être avec un ami et que Morten est allé à Serpentard. Tu sais que tu aurais eu ta place à Serdaigle aussi, parce que tu es un garçon intelligent. Tu fais juste ta crise d’adolescence un peu tard, et alors ? Qui a parlé de t’en vouloir pour ça ? »

Emma jouait avec les mèches blondes, légèrement bouclées. Elle les passait entre ses doigts, les faisait glisser le long de ses phalanges. Elle se demandait ce qui serait arrivé si Braxton était effectivement allé à Serdaigle plutôt qu’à Serpentard. Elle ne l’aurait probablement jamais surpris en train de racketter un élève de Gryffondor. Cette simple supposition entraînait tellement de questionnements dans sa tête que ça l’en épuisait davantage que le réveil en sursaut auquel elle avait eu droit. Est-ce qu’ils seraient toujours ensemble à ce jour ? Est-ce que leur relation aurait évolué et serait devenue plus – quel était le mot à utiliser ? – intense ? Réelle ? C’était trop de possibilités inenvisageables pour elle. Et puis, au fond, elle savait pertinemment que ce qu’elle éprouvait pour Will dépassait le bon entendement et que son hypothétique relation amoureuse avec Braxton en aurait forcément souffert. Doucement, elle enfouit son nez dans le cou du Serpentard, et murmura :

« Jeg stadig elsker dig Braxton, men ikke på samme måde, som jeg brugt til før. »

Elle savait parfaitement qu’il ne comprendrait pas un mot de ce qu’elle venait de lui dire. Mais elle ne se sentait pas encore le courage de le lui dire en anglais. Elle ferma les yeux, sa respiration devenant de plus en plus régulière. S’il ne disait rien dans les minutes qui suivaient, elle s’endormirait contre lui.

[pour traduire, outils de traduction de google. Danois vers anglais de préférence, la traduction est très mauvaise en français]

« Ecoute Brax… »

Le front calé sur l'épaule d'Emma, Braxton se raidit. Il se sentait bien, là, dans cette position. Il y serait resté éternellement s'il avait pu. Mais il redoutait en même temps les paroles à venir. La jeune fille n'avait pas l'air énervée, ni même agacée. Plutôt pleine de compassion. Pourtant, avec ce qu'il avait fait, Braxton craignait plus que tout qu'elle ne se détourne de lui. Mais il savait aussi dans les tréfonds de son âme que c'était une crainte idiote. Ils avaient déjà partagé tant de chose depuis toutes ces années. Cependant, la serdaigle aurait pu le rabrouer, ou lui faire la morale -comme elle l'avait déjà fait tant de fois. Elle avait du sentir que ça n'était pas du tout ce dont il avait besoin. Et il l'en remercia silencieusement.

« Tu n’es pas à Serpentard parce que tu es quelqu’un de mauvais, tu n’es pas quelqu’un de mauvais. Tu le sais. Tu y es parce que tu es ambitieux et parce que c’est la maison qui t’aidera à devenir quelqu’un plus tard. Parce que tu n’aurais jamais pu supporter ce que les autres élèves auraient dit si tu t’étais retrouvé avec ta mère ou ton père pour directeur de maison. Parce que tu avais envie d’être avec un ami et que Morten est allé à Serpentard. Tu sais que tu aurais eu ta place à Serdaigle aussi, parce que tu es un garçon intelligent. »

Les mots qu'Emma prononçait tombaient comme une caresse sur ses blessures psychiques. Son cœur les examina un à un. Avec méfiance d'abord, puis en les enfermant à double tour en son sein, comme s'il s'agissait d'oiseaux rares sous le nez d'un ornithologue passionné. Elle avait raison, comme souvent. Même si Braxton ne l'aurait pas laissée se délecter de cette petite victoire en temps normal.

« Tu fais juste ta crise d’adolescence un peu tard, et alors ? »

Cette remarque lui arracha malgré tout un sourire silencieux. Il avait l'air malin maintenant. Heureusement que Morten n'était pas là, une fois de plus. Remarque, il aurait sans doute compris ce qui se passait. Quoiqu'on en dise, l'idiot ne l'était pas tant que ça... il était juste... un peu trop expansif. Enfin, ça, c'était ce que tout le monde se disait pour se rassurer sur l'état mentale du grand frère d'Emma...

« Qui a parlé de t’en vouloir pour ça ? »

Un petit soupire fila d'entre ses lèvres, alors qu'une part de la pression qu'il avait accumulée ces derniers temps faiblissait. Emma enfouit sa tête dans son cou, laissant à Braxton le loisir de respirer le parfum de sa peau. Il y puisa le reste de réconfort dont il aurait besoin pour repartir du bon pied. Il ne demanda pas ce que signifiait la phrase en danois que l'adolescente lui souffla. Il en goûta un instant la sonorité, la faisant rouler contre son palais. Comme le sens lui échappait complètement, le jeune homme ne savait pas s'il aurait du s'en réjouir ou non. Il n'y retrouva rien de commun avec le letton, sa propre langue natale... Braxton finit cependant par se faire une raison, jugeant que si c'était quelque chose d'important, la jeune fille le lui révélerait un jour. Ou lui en ferait néanmoins ressentir, peut-être à son insu, le sens profond. Le vert et argent ignorait complètement en cet instant que tous deux étaient soumis au même problème. La seule différence étant qu'Emma y avait apporté une réponse définitive, alors que lui même ne s'était pas encore franchement posé la question.

Depuis qu'il était à Poudlard, Braxton n'avait pas vraiment enchaîné les conquêtes comme Morten avait pu le faire. Il sortait rarement avec des serpentards du groupe de fanatiques en chaleurs qui lui tournaient autour. Pas même pour calmer le jeu. Car, à vrai dire, la majorité d'entre elles apparaissaient à ses yeux comme des chiennes enragées, superficielles et geignardes. Et s'il y avait quelque chose qu'il ne supportait pas, c'était la niaiserie.
Lorsqu'il comprenait qu'une personne lui plaisait, Braxton ne se jetait pas dessus sans crier gare, sous prétexte qu'il était le beau gosse sexy toujours prêt à se battre. Discret, il cherchait d'abord à faire connaissance, à tâter le terrain. Ensuite, s'il voyait qu'il y avait une réponse, il se jetait à l'eau. La plupart des gens ne remarquait pas son petit jeu. En réalité, cette même majorité se contentait de retenir simplement que telle ou telle fille "ultra populaire" avait réussi à attraper entre ses griffes "l'ultra beau-gosse bagarreur" -ce qui était de plus une illusion complète. Et lorsqu'une demoiselle d'une maison autre que celle de Salazar avait le malheur d'avancer qu'elle était sorti avec lui, beaucoup dénigraient royalement ses remarques à l'aide d'un "comme tout le monde, dans tes rêves". Pour Braxton, ce n'était pas plus mal. Ces filles-là évitaient ainsi facilement de devenir les proies de groupies en furies. Quand ils se recroisaient, c'était généralement en bons amis et tout sourire. Il n'y avait qu'elles pour croire vraiment que Braxton était autre chose qu'une brutasse insensible de Serpentard.

Elles, et Morten. Et Emma.

Le vert et argent la serra longuement dans ses bras. Il se détacha ensuite d'elle, presque à regret, en lui murmurant au passage un remerciement dans le creux de l'oreille.

"T'es une fille géniale, Emma. Personne ne te mérite réellement."

D'un geste presque enfantin, Braxton essuya ensuite ses joues salées par les larmes qui avaient coulé malgré lui. Avant de plonger ses yeux rougis dans son regard noisettes.

"Surtout pas moi..."

Son petit sourire d'excuse se transforma bien vite en un petit rictus espiègle, tandis que son cœur passait l'éponge sur cette petite faiblesse.

"Ceci-dit, je croyais vraiment que tes seins seraient plus confortables. Ce William Green doit vraiment aimer les planches à pains !"

Et avant qu'elle ne puisse faire un geste, Braxton pris la jeune fille contre lui, la fit basculer en arrière d'un geste habile, puis passa son autre bras au creux de ses genoux... de manière à ce que, lorsqu'il se releva d'un bond, il la portait comme une nouvelle Cendrillon des temps modernes. Il la tenait fermement, et elle aurait beau se débattre, Braxton ne la lâcherait pas. Il se précipita vers le matelas de Morten comme si elle ne pesait pas plus lourd qu'une plume et la largua sur les draps humides, où elle rebondit quelques secondes. Il la regarda faire avec un petit rire machiavélique.

"Tu ne croyais quand même pas que j'allais vraiment te laisser dormir dans mon lit, petit parasite !"

Dans une dernière provocation, le vert et argent tourna les talons en sifflotant comme un innocent, faisant mine de retourner vers son propre lit, tout guilleret.

"T'es une fille géniale, Emma. Personne ne te mérite réellement. Surtout pas moi…"

Emma ne répondit rien à cela. D’abord parce qu’elle n’était pas sûre qu’il ait parfaitement raison à ce sujet, ensuite parce qu’elle n’avait qu’une moquerie à lui répondre, et elle n’avait pas envie qu’il replonge dans son mutisme, qui était un peu trop perturbant pour elle. Elle l’observa essuyer ses joues sur lesquelles des larmes avaient coulé, se rendant alors seulement compte qu’il avait humidifié son t-shirt de ses pleurs silencieux. Cependant, le sourire qui s’était formé sur les lèvres de son ami se transforma très vite en une lueur qui ne lui disait rien qui vaille.

"Ceci-dit, je croyais vraiment que tes seins seraient plus confortables. Ce William Green doit vraiment aimer les planches à pains !"

La jeune fille crut qu’elle avait rêvé. Elle n’était pas sûre d’avoir bien compris qu’il venait de faire une remarque sur sa poitrine. Depuis quand se permettait-il de la traiter de planche à pain, sérieusement ? Est-ce qu’il s’était vu, le bellâtre, avant de parler ? Parce que niveau musculation, elle avait déjà vu mieux. Elle ne put cependant lui renvoyer une réponse acerbe et cynique. Avant qu’elle ait pu faire quoi que ce soit, il l’avait prise dans ses bras comme si elle avait été une jeune mariée portée par son époux pour traverser le seuil de leur demeure conjugale. La jeune fille eut la désagréable idée de comparer ça au fait que Will ne l’avait prise dans ses bras de cette manière. Elle se fustigea mentalement. Pourquoi n’arrêtait-elle pas de comparer son ami à son petit ami ? Elle espérait sincèrement se défaire de cette manie, et ne pas en faire une mauvaise habitude. Elle ne se débattit pas – de toute façon, ça n’aurait servi à rien vu la musculature du porteur – et attendit patiemment de voir ce qu’il voulait faire. Il la lâcha sur le lit de Morten et sur la couverture trempée, et elle fit quelques bonds sur le matelas avant de se stabiliser tandis qu’il faisait demi-tour et se moquait doucement d’elle.

"Tu ne croyais quand même pas que j'allais vraiment te laisser dormir dans mon lit, petit parasite !"

« A vrai dire, si, j’y ai cru, » répliqua-t-elle de sa voix la plus sincère.

Déjà, Emma n’appréciait pas de se faire traiter de parasite. Elle était loin de ressembler à un pou ou une puce. Elle était quand même beaucoup plus jolie qu’une bestiole noire et poilue. Et puis, Braxton allait le regretter. En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire et l’écrire, elle attrapa sa baguette dans son sac et envoya la couverture trempée sur la tête du Serpentard. Et loin de se contenter de ça, elle jeta également un sort sur la couverture du lit où elle s’était déshabillée quelques minutes auparavant pour l’attirer à elle. Sans attendre une seconde, elle s’emmitoufla dedans comme une petite marmotte et tira la langue à Braxton qui venait de se retourner vers elle.

« Tu la veux ? Viens la chercher ! »

La Serdaigle se doutait pertinemment qu’il tenterait de récupérer son bien. Elle l’observa alors qu’il laissait tomber la couette mouillée sur le sol, et, alors qu’il allait faire son premier pas pour se jeter sur elle – du moins était-ce ce dont elle avait l’impression – elle tendit son bras et sa baguette devant elle, pointant le bout de bois sur Braxton. Devant ce spectacle, il arrêta net ce qu’il s’apprêtait à faire, ce qui ne fit que renforcer le sourire victorieux de la jeune fille. Pour l’effrayer, elle laissa quelques étincelles de lumière s’échapper de sa baguette. Elle n’avait aucune intention de lui jeter un sort. C’était dangereux dans un espace clos comme ce dortoir, et puis ça pourrait augmenter les dégâts qu’il avait déjà au cerveau. Pas besoin de le rendre encore plus bête qu’il n’était déjà. Alors qu’elle était dans ses pensées, elle ne vit que du coin de l’œil le Serpentard profiter de ce moment d’inattention qu’elle avait eu. En moins de deux secondes, il s’était jeté sur elle et l’avait désarmée. Elle se retrouvait allongée sur le lit et la couverture, les poignets coincés dans une des mains de Braxton, lui sur elle.

Elle allait se rendre à l’évidence, se dire qu’elle avait perdu une bataille – mais pas la guerre – et rendre les armes quand la porte s’ouvrit… sur Morten, qui les regarda avec les yeux ronds comme des billes. Emma, elle, passa de son frère à Braxton et inversement, jusqu’à ce qu’elle se rende compte que le Serpentard au-dessus d’elle, qui était en train de l’écraser au passage, ne savait visiblement pas quoi faire entre lui régler gentiment son compte et s’empresser de se justifier auprès de son meilleur ami. Ne lui restait plus qu’à saisir l’occasion. Elle dégagea ses poignets et renversa Braxton, se remettant comme quelques minutes avant à califourchon sur lui. Cette fois ce fut elle qui lui maintint les poignets au-dessus de la tête alors qu’elle refermait sa prise sur son corps avec ses genoux, qui s’enfonçaient légèrement dans les hanches du Serpentard. Quant à Morten, elle avait décidé de l’ignorer pour le moment, tant qu’elle n’en avait pas fini avec le crétin qu’elle avait sous la main. Un crétin à la fois, et les dragons seraient bien gardés. Elle se pencha vers son prisonnier pour lui susurrer à l’oreille.

« Si tu ne veux pas que je dorme dans ton lit, soit, je dormirai dans celui-là. Mais il est hors de question que je dorme avec une couverture trempée, je n’ai pas envie d’être malade. Donc, en galant jeune homme que je sais que tu n’es pas, tu vas me laisser ta couverture, ou alors je dis à Morten que tu m’as sauté dessus tout nu et que j’ai eu la joie de voir ton dernier tatouage… »

Des menaces ? Oui. C’est qu’elle pouvait être effrayante quand elle voulait, la jeune Nielsen. Puis elle décida d’énerver un peu Morten – au cas où le simple fait qu’elle murmure quelque chose d’inaudible pour lui à l’oreille de son meilleur ami pratiquement nu, elle-même tout aussi peu vêtue, à califourchon sur ledit meilleur ami, ne suffirait pas.

« Braxounet, j’espère que c’est ta baguette que je sens là… »

C’était une de ces journées épuisantes où chaque évènement, même insignifiant, ne faisait qu’amplifier la colère et l’exaspération qu’on ressentait depuis le matin même. Une de ces journées où quoi qu’on fasse, quoi qu’on dise, il en résulte quelque chose de négatif. Alors on préfère se taire et ne rien faire. Sauf que quand un Serpentard est énervé, il ne peut se retenir vraiment longtemps et finit par exprimer ce qu’il ressent, de façon généralement assez explicite. Il était vrai que depuis quelques jours, Morten n’était certes pas au meilleur de sa forme, à cause de ces histoires avec Emma qui l’affectaient bien plus qu’il n’y paraissait, mais aujourd’hui, c’était vraiment pire. Sans savoir exactement pourquoi. C’était comme ça. Personne ne devait se trouver sur son chemin ce jour-là, à ses risques et périls. C’était parti de la mauvaise nuit passée à cause des ronflements d’un de ses camarades de dortoir (qui d’habitude ne le dérangeaient pas), ça avait continué avec le café brûlant qui lui avait été renversé dessus à l’heure du petit déjeuner, il avait perdu une bonne partie de sa journée à recommencer encore et encore la rédaction d’un devoir particulièrement compliqué (et il allait devoir le reprendre une fois de plus), pensant que se concentrer dans les études un moment l’aiderait à ne penser à rien d’autre. Mais c’était sans compter sur son esprit qui avait tendance à se focaliser sur un seul problème à la fois, sur un seul souci. Après avoir nourri le feu de la cheminée avec tous ses parchemins à moitié rédigés, Morten était parti faire un tour, allé prendre l’air dans le parc. Il avait bien eu envie de s’allonger dans la neige, juste là, s’allonger et laisser le froid l’envelopper. Il serait resté des heures et des heures, jusqu’à ce que la nuit tombe, pour ne plus avoir à s’énerver sur tout et n’importe quoi, juste écouter le silence. Mais finalement, il s’était dit qu’il ne voulait pas être seul. Il était alors retourné dans les cachots de Serpentards en espérant y trouver Braxton, mais ce ne fut pas son meilleur ami qu’il rencontra. Emma était là, endormie dans un fauteuil de la salle commune. Qu’est-ce qu’elle faisait là ? Elle avait eu d’autres ennuis et était venue lui en parler ? Ou elle voulait lui rappeler à quel point il était idiot d’agir comme il agissait, en lui donnant peut-être une gifle ou deux, histoire de ne pas oublier ce que ça fait ? En attendant, quelle qu’en pouvait être la raison de sa présence, ce fauteuil n’était pas un endroit pour dormir confortablement. La soulevant délicatement, il la prit dans ses bras et la serra contre lui tout en allant dans son dortoir. Combien de temps cela faisait-il qu’il n’avait pas fait ça ? Ces derniers temps, ce n’étaient plus que reproches, cris et blessures qu’ils s’envoyaient mutuellement. En cet instant, plus que jamais, il désirait tout effacer d’un coup de baguette magique. Et tout recommencer. Seulement, ils avaient beau vivre dans un monde où la magie régnait, ils avaient beau jeter des sorts tous les jours, c’était toujours la même réalité, celle qui était si différente des rêves qu’on pouvait avoir, différente de tout ce qu’on est capable d’imaginer. La réalité qui vous rappelle chaque jour un peu plus à quel point elle est cruelle, à quel point ça fait mal, à quel point vous êtes idiot, à quel point c’est de votre faute, à quel point vous ne valez rien. Cette réalité qu’on essaie de changer à tout prix, mais on ne fait que s’infliger plus de douleur. Cette réalité qui fait mal, malgré tous les sortilèges et enchantements du monde.

Le dortoir était vide, et c’était tant mieux. Après avoir enveloppé sa petite sœur dans la couette de son lit et posé son sac à côté, il s’était accordé quelques minutes pour la regarder dormir. Ça lui manquait. Elle lui manquait. Il avait envie de la serrer contre elle encore, comme avant, comme quand il n’y avait pas cette histoire, comme quand il n’y avait pas Green entre eux. Mais les mots étaient là, dans sa tête, les mots qu’Emma lui avait crachés à la figure après l’avoir giflé. « Tu m’oublies, Morten. Parce que pour moi, t’es plus rien. » Ces mots qui le déchiraient complètement, qui faisait qu’il n’arrivait plus à dormir, qui faisait qu’il ne pouvait penser à rien d’autre. Ces mots étaient là, comme imprimés dans son cerveau, tel un post-it pour lui rappeler quel grand frère minable il était.

Morten avait décidé de la laisser dormir seule et d’aller faire encore un tour, des fois qu’il tombe sur Braxton au détour d’un couloir. Et si le nom de ce dernier lui était parvenu aux oreilles plus que d’habitude en l’espace de si peu de temps, l’individu, lui, restait introuvable. Qu’est-ce qu’il avait encore fait ? Il entendit plus qu’il n’écouta quelques conversations sur son passage, et il en conclut que son meilleur ami venait d’ajouter une victime à sa liste. Un Gryffondor, en plus. Un bref sourire en coin apparut sur le visage du Serpentard, même s’il savait que sous ses apparences, Braxton ne devait pas se délecter autant que ça de sa petite victoire. Mais du coup, il devait être de retour aux cachots, expédié par l’un de ses parents – ou les deux – ou même n’importe quel autre membre du personnel de Poudlard. Morten ne fit pas demi-tour, se contentant d’emprunter certains couloirs qui le mèneraient dans le hall, et par la suite dans les sous-sols du château. Il dévalait les légendaires escaliers de marbres lorsqu’il ressentit une pression sur son épaule droite. S’attendant à un visage familier – Braxton au meilleur des cas, William Green au pire – le jeune homme se retourna précipitamment au milieu des marches et se trouva nez à nez avec un garçon ayant une tête bien amochée. Et vu l’insigne qui trônait sur son uniforme, Morten ne fut pas long à faire le lien entre celui qui se tenait devant lui et celui que Braxton venait visiblement de démolir. Il haussa un sourcil interrogateur en se demandant réellement ce qu’il lui voulait.

- Qu’est-ce que tu veux ?
- T’es un bon pote de Terouec, toi, nan ?
- Euh… Oui… Pourquoi ?
- Tu sais très bien pourquoi.
- Ah ouais, mais là, nan… Pas le temps de discuter ou de me battre, vraiment…

Sans ajouter un mot ou un regard de plus, le Serpentard tournait le dos au Gryffondor et descendait les marches qu’il restait. Mais le lion était relativement insistant, et il suivit le serpent pour le forcer à se retourner une nouvelle fois.

- Vous n’allez pas vous en tirer comme ça, ton pote et toi, je te préviens.
- Quoi ? Pourquoi moi ? Qu’est-ce que j’ai fait encore ? Règle tes problèmes avec lui, ok ? Je sais que t’as soif de vengeance, mais là, c’est pas le moment.

Nouveau demi-tour, quelques pas en travers du hall, et nouvel arrêt forcé venant du Gryffondor.

- Nan sérieux, faut que tu me foutes la paix. Ça va mal se terminer, je vais m’énerver, je vais te faire mal, et crois-moi, vu ta tête, t’es déjà assez mal comme ça.

Emma, endormie, dans le dortoir des Serpentards mâles de septième année. Morten ne pouvait se permettre de trop tarder. Comme l’autre ne le lâchait pas, il soupira bruyamment, et tenta de repartir. Sauf qu’il sentit aussitôt un violent coup s’abattre sur sa joue droite et le propulser un peu plus loin. Eh merde. Ni une ni deux, Morten se retourna peut-être un peu plus rapidement que l’autre ne s’y était attendu, et abattit son poing dans l’estomac du rouge et or.

- [color=seagreen]Ça, c’est pour m’avoir fait perdre mon temps.

Il lui assena un nouveau coup pour le mettre au sol avant qu’il n’ait pu riposter.

- Et ça, c’est de la part de Braxton.

Et si Morten se dépêcha de regagner la salle commune de sa maison, ce n’était pas par peur des représailles, mais plutôt par peur de ce qui pouvait se passer dans son dortoir.

Heureusement, la quasi-totalité de ses camarades de chambre se trouvaient dans la salle commune. Quasi-totalité, car il en manquait un. Braxton. Soit ce dernier était toujours en vadrouille dans le château – il doutait d’une hypothétique visite à l’infirmerie compte tenu de la faiblesse flagrante du Gryffondor, même si, bon, ça avait été beaucoup plus simple pour Morten – soit, il était dans le dortoir. Et d’après quelques rares regards qui en disaient long, Emma n’en était pas encore ressortie. Ce ne fut donc pas en courant qu’il regagna la pièce, puisqu’il avait une totale confiance en son meilleur ami et sa petite sœur – qu’il savait être fidèle de toute façon, même si le simple fait de visualiser le nom ou le visage de son petit-ami lui donnait envie de s’auto-avada kedavriser.

Mais peut-être qu’il aurait du courir, finalement.

C’était une de ces journées où on ne vous lâche pas jusqu’à la dernière minute. Où on vous en fait voir de toutes les couleurs, et vous en arrivez à un tel point qu’une situation qui devrait provoquer une crise cardiaque ou tout mouvement hyper actif ne vous arrache qu’un soupir blasé. Exactement. S’il avait d’abord découvert la scène avec des yeux ronds de surprise, Morten venait de lâcher un long soupir, la mine complètement blasée.

- Pitié Emma, dis-moi que je rêve, dis-moi que tu n’es pas en petite culotte à califourchon sur un Braxton simplement vêtu d’un caleçon.

Mais apparemment, ni l’un ni l’autre ne prêtait attention à lui, trop occupés à se murmurer on ne sait trop quoi. L'air suspicieux, Morten s'avança doucement, comme pour conitnuer à ne pas se faire remarquer pour qu'il puisse entendre et écouter ce qu'Emma avait de si intéressant à lui dire... Trop tard, elle avait terminé son petit discours. Le Serpentard n'avait plus l'air blasé du tout, bien au contraire, il était au taquet, et comptait bien comprendre ce qui se passait ici.

- Emma, qu’est-ce que tu fous en petite culotte sur lui ? Dans MON lit ? Enfin, toi, c’est normal, c’est là où je t’avais laissée, mais TOI – regard en direction de Braxton – c’est pas normal. On m’explique ? S’il vous plait ?

Et lorsque lui parvint la dernière phrase d’Emma, Morten perdit toutes ses couleurs et ses yeux furent plus grands ouverts que jamais. Une, deux secondes de silence, le temps de se remettre du choc. C’était pas possible, il nageait en plein délire… En tout cas, délire ou pas, ça devait s’arrêter là. Il franchit d’un pas la distance qui le séparait de son propre lit, attrapa Emma par la taille, la souleva et la posa debout à côté de lui, avant de faire le tour du sommier, de saisir Braxton par ses deux poignets dans une seule main et par la taille également, afin de le porter en travers sur ses épaules – non sans un effort, c’est qu’elle était lourde la bête ! – pour aller le balancer dans son lit à lui. Sans ajouter ni mot ni regard, il ramassa la jupe d’Emma, la lança à cette dernière qu’il ne tarda pas à replacer dans son lit, comme il l’avait fait un peu plus tôt. Il se contenta cette fois-ci de l’asseoir sur le matelas.

- Eyh ! Elle est où ma couverture ?

Regard furtif autour de la pièce. L’objet repéré, Morten le récupéra, et râla de nouveau :

- Pourquoi elle est trempée ? Mais bon sang, qu’est-ce que vous foutiez ?!

« Tu la veux ? Viens la chercher ! »

Pour le coup, Braxton avait purement et simplement halluciné. S'il y avait une chose qu'il n'appréciait pas -autre que la niaiserie- c'était bien qu'on le menace avec une baguette. Tout au fond de son esprit, quelque chose d'animal s'était soudain agité, lui déclenchant des frissons qui parcoururent nerveusement son échine. Mais Emma n'aurait jamais lancé sciemment un sort contre lui, juste pour des mots... et puis l'espace était trop étroit, elle risquait de faire des dégâts. Ceci-dit, dans le doute...

Profitant d'un instant d'inattention, l'adolescent s'était jeté sur elle avec une vélocité qu'il ne se connaissait pas. Après une courte rixe, Braxton avait remporté la première manche. Si la jeune fille était plus maline, lui-même avait bien plus d'expérience pour ce qui était de maîtriser un adversaire dans un corps à corps. Enfin, "maline". Disons simplement que la seule pensée d'utiliser sa propre baguette -inaccessible pour l'heure- contre un "ami" ne l'avait même pas effleurée. Et ne le ferait sans doute jamais. Même s'il ne s'agissait que de pointer d'un air menaçant. Emma aurait beau dire ce qu'elle voudrait, durant ce laps de temps la situation ne lui avait plus parut aussi amusante. Mais peut-être était-ce ce qu'elle recherchait après tout.

Maintenant qu'il la tenait à sa merci, le jeu avait repris un tournure plus comique. Elle allait s'avouer vaincue, le serpentard le sentait. Et de toute manière, c'était l'exacte réalité... Allez Emma, quoi, vas-y, dis moi tout... "je me rend", "jeee..."
Braxton ne s'attendait pas à ce que Morten débarque pile à cet instant cruciale. Bon, s'il avait eu une tasse et des feuilles de thé, il aurait éventuellement pu prédire ce revirement de situation... Mais il n'avait pas de tasse... et puis, pas pratique même pour un ambidextre de préparer le thé sur un lit, sans baguette, et avec une seule main de libre. Alors, bon ! Il ne lui restait plus pour l'heure qu'à rester immobile, choqué par l'arrivée inopinée du grand-frère d'Emma. Elle était en tee-shirt et petite culotte, lui-même n'étant vêtu que d'un simple caleçon... un peu trop moulant en prime au vue de la situation actuelle. Et il était aussi un peu beaucoup couché sur elle... ahem. Cherchez l'erreur. Morten mis à part.

Alors qu'il réfléchissait à une manière de se dépatouiller de ce tragique évènement -du moins, tragique étant donné ce qu'il allait prendre en pleine face- Braxton relâcha son étreinte. A vrai dire, et uniquement pour lui apparemment, la blague arrivait à son terme. C'était sans compter sur Emma, qui profita de ce revirement pour renverser l'action en son sens.

- Pitié Emma, dis-moi que je rêve, dis-moi que tu n’es pas en petite culotte à califourchon sur un Braxton simplement vêtu d’un caleçon.

Car une fois de plus, la jeune fille se retrouvait en dompteuse d'étalon, installée sur le vert et argent, au niveau de ses hanches... dans une pose pire qu'indécente.
Totalement pris au dépourvu -chose plutôt rarissime venant de Braxton- le jeune homme lui coula un regard effaré avant d'essayer de tourner la tête vers Morten. Mais l'adolescente lui laissa à peine le temps de respirer.

« Si tu ne veux pas que je dorme dans ton lit, soit, je dormirai dans celui-là. Mais il est hors de question que je dorme avec une couverture trempée, je n’ai pas envie d’être malade. Donc, en galant jeune homme que je sais que tu n’es pas, tu vas me laisser ta couverture, Braxton se teint coi... Pourquoi en était-elle resté là, bon sang ! Ce n'était pas le moment ! ou alors je dis à Morten que tu m’as sauté dessus tout nu et que j’ai eu la joie de voir ton dernier tatouage… »

Oh la gueuse. Le serpent modifia sa première pensée: elle était peut-être bien maline. En vérité, il le savait depuis leur plus tendre enfance. Mais aujourd'hui, elle l'était à la manière d'une serdaigle dont le grand-frère résidait chez Salazar... limite un peu mesquin, quoi.

"C'est un coup bas, ça, Emma."

Et pendant ce temps-là, il entendait Morten s'égosiller, s'énervant presque tout seul: - Emma, qu’est-ce que tu fous en petite culotte sur lui ? Dans MON lit ? Enfin, toi, c’est normal, c’est là où je t’avais laissée, mais TOI c’est pas normal. On m’explique ? S’il vous plait ?

Néanmoins, un petit sourire prit possession de ses lèvres. Braxon devait bien l'avouer: c'était bien joué. Il n'avait plus qu'à s'avouer vaincu. l'étudiant sentait qu'il n'avait déjà pas l'air très fin devant Morten, qui devait s'imaginer les pires insanités possibles. Alors si, en prime, il apprenait ce qui s'était réellement produit... le jeune homme ne donnait pas cher de sa peau, une fois de plus. Et quoiqu'on en dise, il tenait aussi beaucoup à son amitié avec le grand-frère d'Emma, qui pour l'heure affichait un air plutôt furax. Au final, Morten saurait tout un jour... et même si ça le gênerait profondément, Brax savait qu'il ne manquerait pas une occasion de se foutre de lui. Notamment parce que son intention première, sur un coup de tête, d'accord, avait été de se jeter sur son corps endormi pour lui faire payer quelques petites broutilles.
Mais il savait aussi qu'en ce moment, ça n'allait pas très fort entre le frère et la sœur. Et qu'avec ses imbécilités, il se retrouvait à présent pris entre deux feux... ou plutôt deux bon gros incendies de forêt.

« Braxounet, j’espère que c’est ta baguette que je sens là… »

Décidément, il ne s'était pas planté. Emma était d'une humeur bien chienne maintenant que son aîné était là. Disons plutôt, pire que quelques instants auparavant. Braxton en était encore à se demander s'il devait apprécier ou non la blague, lorsque Morten ôta la jeune fille du lit. Elle s'était servie de lui pour énerver encore plus son frère... et qui c'est qui allait tout prendre, ou presque ? Biii-bi ! *clap clap clap* Biii-bi ! *clap clap clap*.

Morten et Braxton étaient à peu de chose près de forces similaires, même si ce dernier pesait plus lourd en muscles et en férocité. Aussi lorsque son "ami peut-être bientôt plus si ami que ça" s'empara de ses poignets dans l'intention de le porter, Braxton émit quelques grognements de protestation:

"'Ten, arrête ça. Calme toi. T'es à côté de la plaque, là..."

Rien à faire, Morten était comme sourd. Et lui-même n'osait rien faire, de peur d'accentuer un peu plus sa colère -si c'était possible. D'autant plus que celle-ci semblait lui donner plus de force. C'était un état que le jeune homme connaissait pour l'avoir expérimenté à de nombreuses reprises, et cela le conforta dans sa décision. Lorsqu'ils passèrent près d'Emma, Braxton lui lança un regard agacé qui en disait long. Et notamment quelque chose comme "Ça y'est, t'es heureuse, t'as eu ce que tu voulais ?". Mais il ne dit rien. Si Morten apprenait pour le fait qu'elle ait vu son dernier tatouage en date, et donc son délicieux petit fessier -et donc probablement aussi le reste de sa personne- ce n'était pas juste quelques jours qui lui permettraient d'accepter réellement les explications, puis de passer l'éponge sur toutes les images qui le tortureraient. "Rigolote". Même si intérieurement le vert et argent riait doucement, il n'était pas très fier de l'attitude d'Emma en cet instant.

Enfin, Morten le largua sur son lit, et Braxton s'autorisa un sourire en coin en se rappelant qu'il venait de faire la même chose avec Emma... quoique de manière un peu plus élégante.

"T'en, tu connais le mot "quiproquo" au moins ?"

Rien à faire. Son compagnon de chambre s'était muré dans un lourd silence, plus profond encore que la nuit finissant de tomber derrière les volets clos. Il s'assit sur le bord du matelas, contemplant Emma qui avait été forcée à faire de même sur le lit de Morten. Ils avaient l'air mignons, tous les deux, comme deux gosses pris en flague par leur mère alors qu'ils préparaient une grosse bêtise. Ce qui n'était d'ailleurs pas le cas. Même si pour le moment ça en avait tout l'air.

- Eyh ! Elle est où ma couverture ?

Ah, la couverture. Si Emma n'avait pas été aussi mauvaise perdante, la dite couverture attendrait toujours son propriétaire au bord du lit. Mais même ça, ça avait foiré. Quoique, maintenant, Morten la découvrait effectivement... dans des circonstances imprévues, cependant.

- Pourquoi elle est trempée ? Mais bon sang, qu’est-ce que vous foutiez ?!

Avec un sourire, Braxton répondit du tac-au-tac:

"C'était une petite vengeance personnelle, à la base." Et le jeune homme jeta un regard blasé à la serdaigle, comme s'il s'agissait d'une gamine de douze ans qui n'aurait pas été sage. Il reporta cependant bien vite son regard sur Morten pour éviter qu'elle ne l'interrompe: "Mais je crois que ça s'est transformé en très grosse vengeance. Et pas venant de moi, celle-là".

D'un geste, l'étudiant se saisit de sa propre couverture qu'il lança habilement à Emma, avant de récupérer l'un de ses oreillers. Puis, le serpentard se releva et se dirigea vers la porte de sortie.
La jeune demoiselle comprendrait le message... C'était un peu comme s'il venait de déposer les armes pour bien montrer qu'il avait perdu cette bataille. Et quoiqu'elle pense, quoiqu'elle soit en mesure de révéler, Braxton sentait qu'il n'avait plus sa place ici. La tension entre la fratrie était palpable, un peu trop même. Et cette chose au creux de son cœur, cette chose qu'il avait déjà sentie bouger un peu plus tôt, semblait l'exhorter à présent à la plus grande prudence.

En passant près de Morten, Braxton récupéra doucement la couverture détrempée qu'il tenait toujours, comme pour qu'il ne reprenne pas trop vite ses esprits, avant de reprendre son chemin. Presque arrivé à la porte, il lança par-dessus son épaule:

"Si vous me cherchez, je serai dans la salle commune."

- Pitié Emma, dis-moi que je rêve, dis-moi que tu n’es pas en petite culotte à califourchon sur un Braxton simplement vêtu d’un caleçon.

La jeune fille n’avait rien à répondre à cela. Il le voyait bien de ses propres yeux, non, et il croyait pourtant qu’elle et Braxton étaient en train de … ? Yeurk, dégoûtante supposition. Enfin, sans vouloir vexer Braxton, parce que dans d’autres circonstances, pourquoi pas, mais là, franchement. N’importe quoi le Morten. Fallait vraiment qu’il arrête la drogue, ou alors son pauvre cerveau déjà pas très en forme ne s’en relèverait pas.

- Emma, qu’est-ce que tu fous en petite culotte sur lui ? Dans MON lit ? Enfin, toi, c’est normal, c’est là où je t’avais laissée, mais TOI c’est pas normal. On m’explique ? S’il vous plait ?

Elle allait lui répondre une idiotie. Ça le ferait enrager, ça serait drôle. Sauf que non. D’un coup, Emma n’était plus sur Braxton en train de lui faire subir les pires outrages (ou pas), mais se retrouvait plantée debout à côté du lit pendant que Morten en extrayait Braxton comme il aurait enlevé une mauvaise herbe du jardin. Une grosse mauvaise herbe. Lourde avec ça, du moins le supposait-elle. C’était qu’il n’était pas content le frangin adoré ! Il avait peur pour la vertu de sa petite sœur chérie ? Peur que l’abominable Braxton des neiges ne lui saute dessus et ne la viole ? Il oubliait peut-être qu’elle était une sorcière dans le lot ? Ou qu’elle était fidèle à William, malgré les apparences trompeuses de la scène ? Ou alors qu’elle pouvait très aisément botter le derrière tatoué de leur ami commun ? Elle observa le spectacle avec un sourire satisfait, avant de se retrouver assise à côté de Morten qui venait de balancer Braxounet comme un sac à patates sur son lit. Ce dernier lui jetait un regard noir, auquel elle ne répondit que par un roulement d’yeux. Geeeenre c’était sa faute à elle. Braxton, quant à lui, essayait tant bien que mal de calmer le fauve en furie.

"'Ten, arrête ça. Calme-toi. T'es à côté de la plaque, là..."

Ça, pour être à côté de la plaque, il l’était.

"Ten, tu connais le mot "quiproquo" au moins ?"

Emma voulut signifier à son ami qu’il n’en était rien, et que pour Morten, tout était toujours soit noir soit blanc, sans aucune nuance de gris, mais un coup d’œil de son ainé vers elle l’en dissuada. Chercher les ennuis, certes, c’était drôle deux minutes, mais faire enrager le Serpentard inutilement risquait de lui coûter cher auprès des parents. Elle fixa Braxton dans les yeux, esquissant un faible sourire qui voulait dire « Je suis désolée pour tout ça » accompagné d’un regard de chien battu qui demandait « Tu me pardonnes ? », puis baissa la tête et fixa le bout de ses pieds. Morten s’enquérait de sa couverture pour la trouver par terre, complètement trempée. A peine le temps de proposer de la sécher d’un sort, elle se retrouvait avec sa jupe sur les genoux et avec Braxton qui tentait mesquinement de s’échapper et de la laisser dans la mouise. Super. Elle releva les yeux vers lui, tandis qu’il embarquait la couverture humide pour lui laisser la sèche, et le supplia du regard, que dis-je, l’implora du regard de ne pas la laisser seule avec Morten. Sauf que le sale traître s’approchait dangereusement de la porte du dortoir. Emma, baguette en main, ne perdit pas de temps. Ni une ni deux, elle la pointa sur Braxton.

« Petrificus Totalus. Accio Braxton. »

Avant que le Serpentard pétrifié n’ait eu le temps de toucher le sol, le second sort l’avait atteint et le ramenait vers le frère et la sœur. C’est Morten qui le réceptionna tant bien que mal – il faisait son poids tout de même, le gros bébé – tandis qu’Emma récupérait la couverture et la séchait d’un coup de baguette. Ensuite, en moins de temps qu’il n’en faut pour dire hippogriffe, elle enfila collant, jupe, veste et chaussures et récupéra son sac. Elle annula le sort du saucisson sur Braxton et tourna les talons.

« Je crois que le mieux, c’est de vous laisser entre garçons. Même si je ne pense pas que deux trous-du-cul soient plus efficaces qu’un seul ! Oh, et Brax… Je retire ce que j’ai dit. Elle n’est pas petite, finalement…» finit-elle avec un sourire appréciateur, tandis qu’elle lorgnait visiblement sur le caleçon du Serpentard, qui avait dû se trouver plus étroit suite au contact rapproché entre elle et lui.

Alors qu’elle allait passer la porte, elle sentit une main la retenir par le bras. Elle se tourna et découvrit Morten, l’air triste. Elle en aurait presque fondu, mais elle n’avait plus envie de lui parler maintenant. Elle jeta juste un sortilège de guérison sur sa joue, là où il avait visiblement pris un mauvais coup, puis franchit la porte et se retrouva dans la salle commune. Tous les septièmes années mâles étaient encore là, à fixer la porte du dortoir comme si un dragon allait en sortir. Ils attendaient apparemment de savoir si quelque était mort, ou blessé (pas forcément dans cet ordre-là) pour oser pénétrer dans leur repaire. Emma accorda un sourire à ceux qu’elle connaissait, puis traversa la salle… jusqu’au moment où elle fut soulevée dans les airs et posée sur une épaule comme un sac à patates. Décidément, c’était une manie ce soir. Elle avisa le visage de son assaillant. Elle s’était attendue à ce que ce soit Morten, mais il n’en était rien.

« Braxton, espèce de sale con ! Lâche-moi tout de suite ! »

Visiblement, la lâcher ne faisait pas partie des intentions de Braxton, qui la ramena aussi sec dans le dortoir, après avoir lancé une petite boutade aux autres garçons. Bravo. Très viril. La Serdaigle le fusilla du regard au moment où il daigna enfin la libérer de son emprise pour la reposer sur le lit de Morten. Ce dernier, absent de la pièce pour le moment, devait être dans la salle de bains. Il revint pile au moment où Emma se saisit de la main droite de Braxton dans sa main gauche et leur lança un sortilège de glue.

« Ah ah ! Voilà, si je dois rester, toi aussi pour la peine ! »

Très mature tout ça, n’est-ce pas ? Morten ne sembla pas très heureux de ce nouveau sortilège, et, s’approchant d’eux, il posa sa main sur l’épaule de Braxton. Alors qu’il allait certainement lui demander d’annuler le sort, Emma lui lança le même. Ils étaient collés les uns aux autres. C’était hilarant. La jeune fille retira une nouvelle fois ses chaussures et sa veste, mais garda sa jupe et ses collants, supposant que cela conviendrait davantage à son frère, puis les entraîna tous les deux sur le lit. Après tout, elle était fatiguée, malgré les derniers évènements.

« Est-ce que vous voulez bien qu’on dorme, maintenant, ou ça serait trop vous demander ? »

C’est dans ces instants là qu’on aimerait pouvoir lire dans les pensées des autres, de retourner dans le temps et d’être capable de se rendre invisible, juste pour être au courant de ce qui s’était passé. Car visiblement, ça faisait un moment qu’ils s’amusaient ces deux là. Au moins lire dans les pensées, histoire de comprendre au moins de quoi ils parlaient. Parce que Morten était complètement perdu. Il était partagé entre le désir de foutre le camp sur le champ et faire comme s’il n’avait rien vu, parce qu’il redoutait l’instant où il saurait la vérité (et elle lui faisait peur) et le besoin de rester planté là jusqu’à ce qu’on lui raconte dans les moindres détails (il ne savait pas jusqu’où ça allait exactement) et de ne plus laisser les deux clampins sans surveillance une seconde de plus. Bien qu’il fut attentif à la moindre parole provenant d’Emma ou Braxton, Morten resta figé lorsque son meilleur ami commença à s’éclipser, réagissant à peine, se contentant de le suivre du regard. Ce fut lorsqu’il lui retira la couette des mains qu’il comprit ce qu’il était en train de faire (le choc émotionnel ralentissant considérablement la connexion entre ses quelques neurones). Il s’échappait. Le gueux. Il s’échappait, il fuyait. Morten lui lança un regard noir comme il savait si bien les faire (c’est ce qui faisait son charme) tandis qu’il se dirigeait vers la sortie, comme pour lui dire « de toute façon, où que t’ailles, je te retrouverai, je saurai ce que t’as fait à ma sœur, et je te ferai passer l’envie de recommencer… ». Bien sûr, Morten n’avait pas envie de cogner sur Braxton au point de le défigurer, il n’avait même pas envie de lui cogner dessus tout court – l’idée lui avait à peine effleuré l’esprit – il s’agissait quand même de son meilleur ami. Ce regard noir, c’était plutôt pour lui faire comprendre qu’il avait intérêt à lui raconter ce qui s’était exactement passé dans cette chambre juste avant qu’il ne débarque. Pas un regard comme il avait l’habitude d’en lancer à ces abrutis de Gryffondor de Green et Carter, non, ce regard bien moins haineux qu’il lançait à Braxton quand il avait commis un acte déplaisant. Et alors que Morten suivait toujours son ami des yeux, Emma entra un peu plus dans son champ de vision, et automatiquement, comme si ses yeux étaient réglés pour, son regard se braqua sur la jeune fille. Ce ne fut pas long, juste une demi-seconde, mais ce fut suffisant pour que le Serpentard réalise qu’elle était en train d’implorer Braxton du regard. Elle n’avait aucune envie de rester seule avec son frère. Elle n’avait pas du tout envie de rester dans la même pièce que Morten, sans personne d’autre en sa compagnie. « L’agressivité » de son regard disparut sans qu’il ne s’en rende compte réellement, et il serra les dents, comme pour s’empêcher de prononcer les mots qui lui brûlaient les lèvres. Il ignora le fait que ça lui faisait mal au cœur, il fit même semblant de ne pas avoir vu cette lueur dans les yeux de sa sœur, et regarda de nouveau son meilleur ami, qui venait d’être victime de la rapidité d’Emma. Par reflexe, Morten s’avança et tendit les bras pour réceptionner le Serpentard ensorcelé, se forçant à ne pas céder et le laisser s’écraser sur le sol. Il était sur le point de le remettre sur ses pattes lorsque la Serdaigle mit fin au maléfice et déclara s’en aller. Enfin, d’une manière détournée. Disons qu’elle ne manqua pas de leur rappeler à quel point ils étaient idiots, et… Et quoi ?! C’était quoi ce regard vers le caleçon de Braxton ?! Les yeux de l’ainé Nielsen firent l’aller-retour entre les deux autres personnages, mais laissa tomber lorsqu’il se rendit compte qu’Emma était réellement en train de partir. Il lâcha son ami sans prévenir, qui, n’ayant toujours pas retrouvé l’équilibre sur ses deux pieds, s’écrasa comme une larve sur le sol du dortoir. Chute que Morten ignora royalement en se précipitant sur sa sœur pour la retenir. « Ne pars pas. » avait-il juste envie de dire. C’était simple, trois mots. Trois syllabes. C’était la première fois depuis trop longtemps que le frère et la sœur se croisaient sans devoir se hurler dessus, c’était la première fois qu’ils pouvaient enfin discuter calmement, savoir où ils en étaient. Morten aurait presque préféré qu’elle laisse Braxton partir, pour qu’ils soient juste tous les deux. Qu’ils recommencent leurs trucs de frère et sœur, comme avant, comme quand tout allait bien, comme quand ils n’avaient pas mille reproches à faire à l’autre, comme quand c’était simple, comme quand Morten n’avait pas fait toutes ces erreurs. « Ne pars pas. » Phrase non prononcée. Demande non entendue. La porte se referme sur Emma.

Il entendit son ami râler dans son dos, mais n’y fit pas attention. « Va la chercher, s’il te plait. » dit-il simplement. Il n’avait pas le courage de lui courir après. Elle venait de partir, de le laisser malgré sa demande, et même si ce n’était pas grand-chose – elle venait juste de quitter le dortoir des Serpentards mâles de septième année, après tout, ce n’était pas comme si elle partait au bout du monde pour toujours – mais ça faisait toujours autant mal.

Quelques instants plus tard, la porte s’ouvrait pour la deuxième fois depuis l’arrivée de Morten, et celui-ci crut entendre quelques éclats de voix venant de la salle commune. Bonsoir les rumeurs. « Un plan à trois ! Dans le dortoir des mecs de septième année des Serpentards ! Nielsen, Nielsen et Terouec. LE plan à trois. Et incestueux, qui plus est. » Beurk, Morten, enlève-toi ça de ta petite tête ! Mais c’était pourtant ce qui risquait d’arriver aux oreilles de tout le château d’ici le lendemain. Encore une journée qui allait le fatiguer…

En attendant le retour des énergumènes, Morten remit en place les couettes sur leurs lits respectifs, et se rendit dans la salle de bains pour enfiler une tenue plus confortable. S’entendait par là un large t-shirt gris et un vieux pantalon qui lui servait de pyjama – il dormait en caleçon le plus souvent, mais étant donné ce qui venait de se dérouler – et encore, il n’était pas au courant de tout, heureusement pour son rythme cardiaque, la moindre des choses était d’être un minimum vêtu. Il plia son uniforme dans un coin de la salle de bains, s’aspergea le visage d’eau, se passa une main dans les cheveux et ressortit en entendant les deux autres revenir. Il poussa un soupir lorsqu’Emma lança un nouveau sortilège, liant leurs deux mains. Elle n’avait vraiment pas envie d’être séparée de Braxton, vraiment pas envie de rester toute seule avec Morten. Mais n’était-ce pas pour cette raison qu’elle était venue au départ ? Elle ne s’était pas endormie dans la salle commune des verts et argents dans l’unique but de se faire une « partie de jambes en l’air » avec Braxton, quand même ? Non, il était persuadé que c’était pour lui qu’elle était entrée. Mais peut-être qu’après avoir ri avec Brax, elle n’avait plus envie d’être sérieuse avec son frère. Ce qui était compréhensible. Mais peut-être qu’il pourrait encore négocier…

Ou pas. Non, Emma avait décidé de faire sa chieuse jusqu’au bout en figeant la main de son frère sur l’épaule de leur ami. Bonsoir. On est tous collé les uns aux autres. Très pratique. Un air à la fois blasé et renfrogné, le Serpentard se laissa entrainer dans son lit sans ajouter un mot.
« Est-ce que vous voulez bien qu’on dorme, maintenant, ou ça serait trop vous demander ? » Ben voyons. Et après, ils allaient essayer de faire croire à l’esprit pervers des élèves de Poudlard que ce n’était qu’un mal entendu, qu’ils avaient simplement dormi entre frères et sœur – car c’était un peu ce que représentait Braxton pour Morten, un frère, et d’un côté, il espérait que ce soit la même chose du côté de sa sœur. Même s’il ne portait pas Green dans son cœur, il la savait fidèle, et cette simple pensée aurait du le rassurer sur les évènements récents. Mais avec les sous-entendus qu’ils se lançaient à la pelle, ces deux là, c’était dur de croire le contraire.

« Comment veux-tu qu’on dorme, Emma, à trois dans mon lit ? Encore, si on avait tous ta silhouette, ça pourrait passer. Mais Brax se rapproche plus du pachyderme que de l’être humain, quand il dort. Et puis pourquoi c’est lui qui dort au milieu ? »

Morten avait laissé sa colère et sa peine de côté pour profiter un maximum, en fin de compte, c’était sans doute la meilleure solution. Peut-être que ce soir, au moins, ils pouvaient faire comme si tout allait bien.

« J’veux bien qu’on dorme, mais annule au moins le sortilège… » supplia Morten, gigotant dans tous les sens pour essayer de se trouver une position plus ou moins confortable.

Comme les trois gosses qu’ils étaient autrefois.

Ça faisait au moins la deuxième fois qu'Emma utilisait la menace de la magie contre lui, en une seule soirée. Sauf que pour cette nouvelle édition, elle l'avait réellement appliquée. Et ça... c'était... non seulement inqualifiable -sans compter que lui-même n'avait pas sa baguette- mais aussi complètement irrespectueux. Il faudrait vraiment qu'il lui en parle à l'avenir, pour que ça ne devienne pas une habitude trop ancrée dans ses réactions. Du coup, pétrifié, Braxton ne pouvait que regarder impuissant son corps s'écraser contre Morten. Le jeune homme n'était pas croyant... mais au moment de l'impact il adressa tout de même une petite prière silencieuse au grand dieu de l'amitié durable:

*Faites que cet imbécile heureux que je chéris, du verbe chérir, ne me lâche pas, pitié.*

Braxton avait l'impression de pouvoir palper le dilemme qui obstruait la conscience de son ami. Lui-même commençait à être sérieusement agacé par la situation. La colère rampait le long de sa colonne vertébrale, doucement, tout doucement... Il en était déjà à cinq sur dix sur l'échelle de "l'endurance du supportable". Et lorsqu'Emma annula le sort, puis que Morten le laissa choir comme une bonne grosse déjection de scroutt à pétard nauséabonde, l'adolescent sentit le minuscule "six" vicieux agiter ses petites pattes en tout sens pour atteindre son barreau attitré. Se redressant, l'étudiant laissa échapper un juron de mécontentement. Il s'apprêtait à invectiver Morten, lorsque son regard se posa sur son dos raidit. Il se figea. Instantanément.
Quelque chose, comme une griffe câline, effleura froidement son cœur.

- Ce n'est pas le moment, Braxton. Aucune menace. Nulle part.|Deux solitaires qui chassent ensemble.

Que, QUOI ? Braxton, tétanisé quelques secondes par le choc, tourna la tête en tout sens, cherchant à découvrir l'origine de cette voix. Morten n'avait pas bronché. C'était donc qu'il n'avait rien entendu. Ou alors il faisait semblant... mais d'un autre côté, il fallait: soit être un excellent acteur pour ne pas montrer de réaction, soit être dans la confidence d'une blague idiote. Sauf que la situation était trop en décalée avec l'idée même d'un mauvais tour pour que ça soit possible. Les mots avaient résonné comme un doux ronronnement, profond, presque réconfortant. Au début, le jeune homme croyait qu'il s'agissait de sa propre conscience qui "s'adressait" à lui, comme souvent. Mais l'image qui s'était imposée à son esprit en parallèle, elle, n'avait rien à faire dans une quelconque conversation avec lui-même...

« Va la chercher. »

Les paroles de Morten l'arrachèrent à ces énigmes, et il releva la tête. Une aura bizarre se dégageait du frère Nielsen. A la fois triste et mélancolique... et comme enserrée par les cordes de l'indécision...
Décidant de reléguer la recherche de réponses à plus tard, Braxton se mit sur pied d'un geste souple. En passant près de Morten, il posa sa main sur son épaule et lui adressa un regard de soutien avant de poursuivre son chemin. Il rattrapa Emma dans la salle commune, ce qui, voyant tous ceux qui les entouraient, lui redonna le sourire. Sans crier gare, le jeune homme s'empara de la serdaigle et la balança sur son épaule, sous les rires amusés des serpentards de septième année se trouvant là.

« Braxton, espèce de sale con ! Lâche-moi tout de suite ! »

Tiens-donc, c'était du joli ça ! Le traiter de sale con... et en public, s'il vous plait ! Les demoiselles d'aujourd'hui faisaient vraiment n'importe quoi. Braxton entreprit donc une petite vengeance personnelle. Pour le sale con. Et puis, pour le coup de la baguette aussi... haha. L'adolescent prit soin d'afficher un sourire espiègle sur tout le trajet qui les ramenait aux dortoirs.

"Désolé les gars, pas touche. Si vous êtes sages on vous en gardera un bout pour le p'tit dej' !"

Mwahaha. C'était démoniaque. Les exclamations salaces fusèrent par dessus leurs têtes. Par chance pour Emma, le vert et argent n'était pas non plus tout à fait idiot. Des rumeurs sur une partie à trois courant sur les Nielsen, okay... mais si c'était pour que tout le monde les imagine, lui et Morten, faisant des galipettes sous la couette... non merci. Aussi lorsqu'ils passèrent devant le dernier de ses "collègues", avant de franchir les portes du dortoir, Braxton lui adressa discrètement un coup d'œil sérieux en articulant silencieusement "ré-u-nion fa-mi-liale". Swan était un bon type. De plus, comme il dormait sur un lit tout proche des deux comparses, il savait aussi que la mauvaise humeur de Morten en ce moment était due à une embrouille avec sa sœur. Braxton lui faisait confiance pour garder l'entrée pendant une vingtaine de minutes avant de se lasser et de balancer des insanités sur le trio. La première action lui éviterait sûrement de se faire fracasser par Morten ET Braxton pour la deuxième. La deuxième seule, par contre, risquait de lui attirer quelques ennuis avec Emma... Ceci dit, on était jamais à l'abri de rien dans les cachots de Salazar.

Fier de lui -en même temps, il lui en fallait peu-, Braxton ramena sa proie au pied du lit du frangin. Il allait ouvrir la bouche pour lui demander de s'expliquer gentiment, quand il sentit la main d'Emma s'emparer de la sienne. Douce, mais ferme.

"Idiote-bête. On lui dit quoi à Morten maintenant ? Qu'on veut se marier et qu'il ne pourra jamais nous en empêcher ? Qu'il ne pourra... oh !, et Braxton minauda la dernière phrase, Ja-mais nous sépar..."

Elle murmura un mot, et Braxton sentit un liquide gluant couler entre ses doigts. Il tenta de retirer sa main... Troisième fois. Génial. je jeune homme poussa un râle de profonde exaspération. Il s'interrompit cependant rapidement avec le retour de Morten. Inutile d'en rajouter une couche. Sauf qu'Emma ne voyait pas les choses de la même manière. Et à présent qu'ils étaient trois collés les uns aux autres, Braxton ne put empêcher un petit rire nerveux. Pauvre Morten. Pauvre, pauvre Morten. S'il ne se suicidait pas dans les jours à venir, ce serait un exploit. Peut-être que Braxton pourrait faire en sorte de ne pas s'en prendre une avant... mouai... ce serait peut-être pas si mal.

« Comment veux-tu qu’on dorme, Emma, à trois dans mon lit ? Encore, si on avait tous ta silhouette, ça pourrait passer. Mais Brax se rapproche plus du pachyderme que de l’être humain, quand il dort. Et puis pourquoi c’est lui qui dort au milieu ? »

Pachyderme ? Hey... c'était pas de sa faute s'il aimait mettre à contribution la totalité de son espace vital, non mais ! Bizarrement, la tension semblait se relâcher. Peut-être qu'au final personne n'allait mourir cette nuit ? Clin d'œil aguicheur à Morten, petit regard coquin pour Emma. Braxton se sentait de nouveau dans son élément.

"Cherche pas, c'est moi le meilleur... j'ai toujours su que vous me vouliez, tous les deux."

D'autant plus qu'il était quand même dans la meilleur position... il risquait juste de crever de chaud... d'habitude c'était toujours Emma qu'ils mettaient au milieu, quand ils étaient gamin. Chacun son tour.

« J’veux bien qu’on dorme, mais annule au moins le sortilège… »

Braxton tourna lui aussi son regard vers Emma.

"Il n'a peut-être pas tord. Personne ne s'enfuira en douce, je pense... oh, et profites-en pour agrandir le lit aussi. C'est pas la magie qui te donne des remords en ce moment, de toute manière."

Et hop ! Petite boutade pour terminer la soirée en beauté. Il n'y aurait probablement pas de discussion sérieuse ce soir. Chacun avait besoin de profiter des autres sans se poser de question, comme une remise à zéro des pendules de l'affection. Les mots durs à entendre et prononcer viendraient vraisemblablement plus tard...